Miroslav Popovic

Les loups de Voïvodine

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À la veille de la Seconde Guerre mondiale, Miroslav Popovic évoque une petite ville, quelque part en Voïvodine. Ici, vivent des Serbes, quelques Hongrois, des Juifs et, très nombreux, ces Allemands que l’on appele "Souabes" dans les Balkans.

Entre ville haute et ville basse, les habitants de diverses langues, origines ou confessions coexistent plutôt heureusement. Dernier venu dans la mosaïque que construit patiemment l’auteur, un voyageur, Bogdan Zurajica, un errant, qui a traîné sa bosse dans beaucoup de sentiers de misère. Il trouve un emploi, comme gardien de l’entrepôt du magasin de meuble de Monsieur Albrecht, et une femme, une veuve, qui le prend chez elle.

Et la vie suit son cours, semblant ignorer les terribles nuages qui s’accumulent sur l’Europe. Lorsque le souffle de l’histoire rattrape le roman, il est déjà trop tard. La Yougoslavie s’est effondrée, et le Reich mobilise ses auxiliaires naturels, les Souabes de Voïvodine.

La littérature yougoslave compte des milliers de romans consacrés à la Seconde Guerre mondiale, où les Partisans communistes tiennent généralement le beau rôle. Ici, le roman s’achève trop tôt, dès 1942, pour les voir apparaître. Il raconte par contre une histoire qui ne laisse guère de place à l’héroïsme, si l’on excepte celui de la survie quotidienne. Et il montre des honnêtes gens, pris, souvent presque à leur insu, dans des logiques qui les dépassent et les broient, parce qu’ils sont Allemands, Juifs ou Serbes. L’histoire des Allemands de Voïvodine qui ont presque tous été chassés à la Libération, pour cause de collaboration collective, constitue toujours un point noir de l’historiographie yougoslave. L’auteur ne justifie rien, et ne plaide aucune cause. Il se contente de raconter, et rarement roman historique n’aura sonné si juste.

Miroslav Popovic est né en 1926 ey meurt en 1985. Les loups de Voïvodine, son unique roman, a connu un succès immédiat dans son pays. Il est heureux qu’il soit enfin traduit en français.