Monsieur le Président Macron,
Vous accueillez un dictateur. Vous le savez – et pourtant, vous l’accueillez à bras ouverts. Des bras ouverts que nous finançons avec des milliards d’euros – pour les Rafale, les concessions, le métro de Belgrade. Pendant que vous faites cela, vous feignez d’ignorer que les étudiants bloquent les universités, que les enseignants manifestent parce que votre cher invité leur supprimer leurs salaires, pendant que les avocats, les travailleurs de la justice, les acteurs, les artistes, les sportifs, les agriculteurs... se révoltent.
La réponse du régime de Vučić, c’est la violence : il organise des battues partisans et des brigades de criminels pour attaquer les étudiants, il ordonne l’utilisation de canons à ondes sonores contre des manifestants pacifiques, et justifie tout cela en affirmant que « la France ferait de même ».
Vous savez, Monsieur le Président Macron, qu’Aleksandar Vučić est à la tête d’un groupe criminel organisé qui a pris en otage les institutions, fait taire les médias, supprimé l’État de droit et détruit les valeurs fondamentales de l’Europe. Vous savez aussi qu’il a transformé la Serbie en l’un des pays les plus corrompus d’Europe.
Et qu’il vole les élections depuis treize ans – ce que confirment l’OSCE, l’ODIHR, le Parlement européen et le Conseil de l’Europe.
Vous n’êtes pas le seul à tout savoir et à fermer les yeux. Mais cela nous fait particulièrement mal que ce soit vous. Car à travers l’histoire, la France a été notre alliée, notre modèle, notre phare de liberté. Les Serbes et les Français ont toujours combattu côte à côte pour les mêmes valeurs – pour la liberté et la justice.
Aujourd’hui, de l’autre côté, il y a Vučić. Et à ses côtés – vous. La Serbie attend de vous plus qu’un verre de cognac au palais de l’Élysée offert à un autocrate dont le système tue des vies et notre avenir. Elle attend de la France qu’elle reste ce qu’elle a été pendant des siècles – un pays qui a éclairé l’Europe, et que les Serbes ont toujours porté dans leur cœur.
Lui, il préférerait voir à vos côtés sa véritable alliée et modèle politique – Marine Le Pen, que vos tribunaux ont condamnée pour corruption. Il sait qu’en Serbie captive, on ne répond pas de la corruption tant qu’on est au pouvoir.
Monsieur le Président Macron, vous marchez dans l’ombre des géants du glorieux passé français. Leurs actions vous rappellent l’esprit de votre nation. Votre accolade au dictateur est une insulte à cet esprit.
La Serbie se battra pour sa liberté. Et elle se souviendra de ceux qui l’ont trahie dans ce combat – et de ceux qui sont restés à ses côtés.
Borko Stefanović, député, vice-président du Parti de la liberté et de la justice
Serbie
Monsieur le Président Macron,
Au moment même où vous accueillez Aleksandar Vučić au Palais de l’Élysée, son régime renforce la répression contre ceux qui s’élèvent contre la corruption, la violence et l’autoritarisme. Il expulse des résidents et des citoyens de l’UE coupables de rien d’autre que de soutenir les manifestations étudiantes pacifiques.
Il punit des enseignants et des professeurs d’université simplement parce qu’ils ont manifesté leur solidarité avec leurs étudiants. Il organise des bandes de voyous et de criminels violents pour frapper des étudiants et des manifestants pacifiques dans toute la Serbie. Il pirate les téléphones de militants de la société civile. Il fait des prisonniers politiques sur la base de preuves obtenues illégalement et sous de fausses accusations de « terrorisme ». Il utilise des canons sonores interdits par la loi contre ses propres citoyens. Il mène des campagnes de diffamation contre les ONG, les journalistes indépendants, les juges, les universitaires et quiconque osant dénoncer la criminalisation généralisée de l’appareil d’État, la destruction de la liberté de la presse, de la démocratie et de l’État de droit. Il accuse les pays de l’UE de conspirer pour renverser le gouvernement et d’organiser une « révolution colorée » en Serbie.
Le régime de Vučić, qui, ces deux dernières années, n’a cessé de glisser vers l’autoritarisme, comme le montrent divers rapports de la Commission européenne, du Parlement européen et de nombreuses autres institutions internationales indépendantes, a désormais franchi une ligne rouge séparant la démocratie, aussi imparfaite soit-elle, de l’autoritarisme. En ignorant les voix de centaines de milliers de manifestants dans les rues serbes et en recourant à des moyens violents et illégaux pour réprimer la dissidence, il s’est placé aux côtés de régimes autoritaires tels que ceux de Vladimir Poutine et d’Alexandre Loukachenko.
Tonino Picula, dont le rapport vient d’être accepté par la commission des affaires étrangères du Parlement européen, affirme qu’Aleksandar Vučić ne souhaite pas l’adhésion de la Serbie à l’UE et que son gouvernement met en danger la démocratie, la liberté des médias et des universitaires, ainsi que l’État de droit.
D’autre part, les étudiants et les citoyens qui manifestent dans les rues de Serbie se battent pour ces mêmes valeurs européennes que le gouvernement serbe tente de réprimer. Ils luttent pour la responsabilité, contre la corruption, pour la démocratie, pour l’État de droit et pour les libertés fondamentales inscrites dans le projet européen. C’est cette Serbie que vous devriez soutenir : une Serbie démocratique, éprise de liberté et européenne. Suivez les traces de vos illustres prédécesseurs, de Clémenceau à De Gaulle, qui ont toujours soutenu la Serbie et sa lutte pour la liberté. Soutenez les étudiants et les citoyens serbes, soutenez la Serbie, soutenez l’Europe et ses valeurs.
Radomir Lazović, co-Président du Front Rouge-Vert, président du groupe Front Rouge-Vert au Parlement de la République de Serbie