Blog • Gestion des déchets : les plus grands défis environnementaux de l’Albanie

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L’Albanie, qui a le statut de candidat à l’UE depuis 2014, travaille lentement pour aligner ses normes environnementales sur celles de l’UE. Et le chemin à parcourir est cahoteux.

La gestion des déchets est, avec la pollution de l’eau et de l’air, la dégradation des terres et la perte de biodiversité, l’un des plus grands défis environnementaux pour le pays balkanique. En 2013, la dégradation de l’environnement avait presque atteint un point de non-retour, avec des déchets illégaux dans tous les coins de l’Albanie et des rivières transformées en décharges.

À l’heure actuelle, le pays enregistre un niveau minimal de taux de recyclage, tout en s’appuyant principalement sur la mise en décharge et le déversement illégal. Cette situation se traduit par des agents "récupérateurs informels" qui collectent les déchets dans les décharges et les poubelles. Le tri visant au recyclage est extrêmement peu développé. Et même là où existent des poubelles différenciées, la plupart contiennent des déchets qui n’auraient pas dû y être jetés. Il y a encore un écart de mentalité et c’est un gros défi. En outre, il n’existe pas de système clair permettant d’organiser le tri et le recyclage.

En ce qui concerne les décharges, on estime que seulement 40% des déchets qui s’y trouvent sont éliminés sur des sites légaux. En bref, la gestion des déchets est généralement à un faible niveau dans tout le pays. La collecte des déchets municipaux est assurée dans la plupart des villes et villages, mais rarement dans les zones rurales. En 2021, environ 70% de la population vivant dans les zones urbaines était desservie par des services de collecte des déchets. Il existe quelques décharges gérées à Sharra, Bushat, Bajkaj, Maliq et Elbasan.

L’Albanie a traité environ un million de tonnes de déchets ménagers en 2019. Et ses pratiques de gestion des déchets sont toujours dominées par une approche linéaire de collecte et d’élimination au lieu d’une gestion durable intégrée. Pourtant, la stratégie nationale de gestion des déchets 2020-2035 a élaboré une feuille de route vers l’intégration des principes de l’économie circulaire. Il s’agit du principal document de planification dans le domaine de la gestion des déchets municipaux, non municipaux et dangereux en Albanie couvrant la période 2020-2035. Le document se base sur le concept “zéro déchet”, c’est-à-dire que les déchets sont collectés et traités comme des matières premières et que la gestion se fait conformément au concept du système d’économie circulaire.

L’objectif principal de ce document est de fournir des orientations stratégiques et de définir une série de mesures. Celles-ci devraient aider le pays à remplir ses obligations découlant du chapitre 27 “environnement et changement climatique” afin de rejoindre l’UE. Le chapitre 27 est intersectoriel et regroupe un certain nombre de ministères et d’organismes indépendants, qui œuvrent dans le domaine de l’environnement et de ses sous-secteurs. Le plan national de gestion des déchets 2020-2035 souligne la nécessité de passer d’une économie linéaire à une économie circulaire visant à prolonger la durée de vie, la collecte par tri à la source et le recyclage à grande échelle.

La stratégie nationale de gestion des déchets 2020-2035 a été adoptée dans le but de se rapprocher des normes de l’UE. Le principe fondamental de la gestion des déchets au niveau de l’UE est la hiérarchie des déchets visant à classer les options de gestion des déchets en fonction des meilleurs critères pour l’environnement et la santé humaine, ainsi que la transition vers une économie circulaire. La priorité est donc donnée à la prévention du gaspillage, en visant à conserver les produits le plus longtemps possible. Dans le cas où un produit devient un déchet, la priorité est donnée à la réutilisation, puis au recyclage, à la valorisation et enfin à l’élimination.

En Albanie, le principal système de collecte des déchets est constitué de “points d’apport” pour les déchets municipaux résiduels (mélangés), où les citoyens apportent leurs déchets pour la collecte. Dans les endroits où aucun service de collecte des déchets n’est fourni, les gens jettent souvent leurs poubelles au bord des routes ou les brûlent à l’air libre. De plus, le principe du “pollueur-payeur” est actuellement peu appliqué dans le pays. En 2021, il y a un incinérateur et on estime que de 10 à 18.5% des déchets municipaux sont collectés pour être recyclés, principalement par des récupérateurs informels qui collectent les déchets des décharges et des poubelles. L’industrie du recyclage, étant l’un des acteurs les plus importants de la gestion des déchets, est très faible en Albanie.

Le recyclage est pourtant probablement l’élément-clé de la réduction des déchets qui s’effectue à travers une chaîne de processus comprenant la séparation à la source, la collecte séparée, la sélection et le traitement, conduisant ensemble à la réduction d’une quantité importante de déchets, qui sont finalement mis en décharge. Certes, le recyclage a progressé en Albanie par rapport à quelques années en arrière. Des entreprises de collecte et de recyclage des métaux, des plastiques, du papier et du verre ont été créées. Le principal obstacle reste la mise en œuvre de ces mécanismes. De plus, l’infrastructure de collecte est faible dans tout le pays, car le nombre de conteneurs est souvent insuffisant. Par ailleurs, le matériel de collecte (conteneurs et camions) n’est pas conforme aux normes européennes et nécessite un renouvellement constant.

Le manque de fonds est un obstacle majeur à l’amélioration du système de gestion des déchets solides municipaux en Albanie. En outre, la qualité des données sur la gestion des déchets est médiocre. Concrètement, il n’existe pas de statistiques exactes sur la production de déchets. Les données et les rapports sont basés sur des estimations des municipalités et des entreprises de recyclage. Ceci, bien sûr, entrave une bonne planification de la gestion des déchets.

Il est nécessaire de développer de nouvelles infrastructures associées à une planification régionale des déchets : mécanismes d’exécution, sensibilisation du public à la question, production de données fiables. Au final, la gestion des déchets doit se faire selon le principe de responsabilité environnementale. En parallèle, le pays a adopté les principes de l’économie circulaire et a intégré des systèmes de gestion des déchets, se rapprochant ainsi de la mise en œuvre des normes de l’UE relatives à l’environnement et au changement climatique. Le projet revient au niveau national au ministère du tourisme et du l’environnement. Il collabore localement pour introduire une gestion des déchets sensible au climat. Ses activités se concentrent sur la récupération et le recyclage, le tri des déchets à la source et l’introduction de la composition.

Le lancement d’une gestion des déchets respectueuse du climat, économe en ressources et économiquement viable a réduit les risques pour la santé et la pollution de l’environnement à moyen terme. En outre, cela a contribué à la réduction des émissions de gaz. De plus, ce processus a également permis d’économiser de l’énergie et des ressources, de créer des emplois dans le secteur de la récupération des ressources et de contribuer au Green Deal de l’UE. Mais il reste encore beaucoup à faire et le chemin à parcourir est semé d’embûches. Le principal défi reste le “changement” de mentalité et la lutte contre les décharges sauvages.

Un changement de cap semble possible. C’est une nécessité si le pays veut, comme il le souligne, rejoindre l’Union européenne. Or, il ne s’agit pas d’un choix, mais plutôt d’un engagement ferme et définitif. Combien de temps faudra-t-il pour que le changement s’opère ? Difficile à dire pour le moment.

L’intégration européenne permet de maintenir un cap mais l’Albanie doit s’engager en montrant des résultats. En se promenant das les rues de Tirana, on se rend compte à quel point le pays est en retard en la matière, tandis que des milliards d’euros sont investis dans de nouveaux bâtiments fantaisistes aux allures de gratte-ciel. Le contraste est saisissant, alors qu’à chaque coin de rues, les déchets sont partout et que les collecteurs informels ramassent les plastiques, les papiers et tout ce qui peut être recyclé. Les priorités doivent être repensées sans attendre.