Paris (75012)

Festival de théâtre européen : le printemps de Paris

| Du au

Lundi 9 mai 2011 – 20h30
MÉRIGNAC-BEAUDÉSERT, TSIGANES FRANÇAIS SOUS L’OCCUPATION
De Michèle Faurie et Christophe Sigognault d’après les travaux d’Emmanuel Filhol
Mise en scène Christophe Sigognault

Les témoins parlent, les historiens écrivent, les artistes portent la parole. Ensemble, lecteurs et auditeurs, nous rebranchons deux fils dénudés sur le courant affaibli de la mémoire. Aux dires de certains anciens, c’est impuissants qu’ils ont assisté durant cette guerre à la spoliation des biens de personnes jugées indésirables sur le territoire, à
l’enfermement, à l’humiliation puis à la déportation. Mais alors, témoins de ces horreurs, pourquoi continuent-ils de traiter cette population déshéritée de « voleurs de poules », à semer la mauvaise parole, jetant toujours le discrédit sur un peuple nomade ?
Avec cette lecture à deux voix, les interprètes cherchent à « redonner vie à ces oubliés de l’histoire » à partir de l’étude de l’historien Emmanuel Filhol portant sur la déportation de Tsiganes français au camp de Mérignac, Poitiers et Sachsenhausen (1940-1945). Il s’agit de remplir consciencieusement, dans un souci d’accomplissement du « Devoir », une case vide de la mémoire nationale, avec l’angoisse de voir ressurgir l’horreur demain matin...
Texte publié aux éditions l’Espace d’un instant

Mardi 10 mai 2011 – 20h30
FUCK YOU, Eu .ro.Pa !
De Nicoleta Esinencu // Traduit du roumain par Mirella Patureau
Mise en scène Veronika Boutinova

« Je ne sais même pas comment le dire… Que j’aimerais chier avec plaisir sur toute votre Europe… ». Tel est le fantasme du personnage créé à Chisinau en 2003 par Nicoleta Esinencu, une dizaine d’années après la chute du mur de Berlin et les retrouvailles Est-Ouest. Dans ce monologue tendre et violent, version lettre au père moldave, où se mêlent musiques et performances gustatives, Charlotte Talpaert incarne avec rage et énergie cette jeune femme
élevée dans la pire des misères, sous le régime communiste, et qui découvre avec écoeurement la surconsommation à l’occidentale… Estomacs fragiles, ne pas s’abstenir !
Nicoleta Esinencu est née en 1978 en Moldavie. Co-auteure du Septième Kafana, ses textes sont
présentés à Avignon, à Paris, à Berlin, à Bucarest, à Montpellier et à Moscou, ainsi qu’au
Festival de Theâtre européen à Dusseldorf et à la Biennale d’art contemporain de Venise. À
cette occasion, FUCK YOU, Eu.ro.Pa ! a fait l’objet d’une question au gouvernement lors d’une
session du parlement roumain.
Texte publié aux éditions l’Espace d’un instant

Mercredi 11 mai 2011 – 20h30
A (II) RH+

De Nicoleta Esinencu // Traduit du roumain par Mirella Patureau
Mise en scène Michèle Harfaut

Un homme.
À qui s’adresse-t-il ?
Il fait la liste des résolutions qu’il a décidé de prendre à partir d’aujourd’hui : inculquer à sa fille des rudiments d’anglais fondés sur la méfiance et le mépris de tous ceux qui ne sont ni de son pays ni de son sang (« the Blacks suck, the Paslestinians suck, the Americans suck […], the Russians suck », etc.), réaffirmer sa place de chef de famille à coups de leçons d’hygiène mentale et corporelle, faire du sport, organiser le quotidien.
Dans cette pièce, Nicoleta Esinencu veut donner à entendre le pire - le racisme au quotidien, la logique de la violence, la colère xénophobe, l’enthousiasme mortifère des revendications nationalistes.
Ça commence donc comme un cahier de bonnes résolutions, ça continue comme un programme de remise en forme, c’est une autohypnose à visée hygiénique, eugénique et raciste. C’est un hymne monstrueux à la gloire du nationalisme, que l’auteur condamne. C’est un chant de haine toxique qui empoisonne celui-là même qui le chante et ceux-là même qui le lisent ou l’écoutent.
Le dernier monologue A(II) RH+ est encore inédit en France.

Jeudi 12 mai 2011 – 20h30
COMMENT J’AI MANGÉ DU CHIEN

D’Evgueni Grichkovets // Traduit du russe par Arnaud le Glanic
Mise en scène Christophe Gauzeran

C’est l’histoire d’un gars qui a existé mais n’existe plus. Pourtant, il est toujours là ! Expression du passage délicat de l’adolescence à l’âge adulte, la pièce évoque ce moment particulier de la vie où le regard des autres sur soi change, où les repères se modifient. Le héros évoque le temps où il a perdu la trace de son enfance, il raconte sa propre disparition. C’est très « russe », tragique mais irrésistiblement drôle !
C’est dans une langue résolument décalée et absurde et dans une énergie tragi-comique, que ce personnage raconte au public des bribes de sa vie. Extrêmement pudique, il semble aller de digressions en digressions pour mieux masquer un désespoir que le spectateur devine, perçoit àtravers les récits absurdes et comiques de la discipline militaire ou sa révolte encore présente face aux codes de l’école.
Grichkovets nous apparaît alors comme un nouveau témoin de cette fameuse « âme russe » que nous connaissons, nous Français, à travers le théâtre de Gogol ou de Tchekhov. Le personnage semble en effet un descendant de Platonov, Ivanov ou du Docteur d’Oncle Vania. Un siècle plus tard, il témoigne de ce même sentiment d’absurde face à la vie. Alors que chacun peut ressentir, par moment, une impression de vacuité, d’inutilité passagère, notre personnage semble réellement bloqué par cette perception. Il est comme écrasé par son incapacité à construire quoi
que ce soit dans cette société. Il n’est pas non plus suicidaire, il est handicapé par le sentiment de la finitude et de l’inutilité de toute construction personnelle…
Evgueni Grichkovets, né en Sibérie en 1967, étudie la philosophie à l’université de Kouzbass où il
fonde le théâtre « Loge ». Il crée et joue Comment j’ai mangé du chien en 1998, pièce qui remporte un grand succès à Moscou au Festival de théâtre international NET. Au cours de la saison 2000-2001, il monte ses pièces en résidence au théâtre « École du drame moderne à Moscou ». Le jury du Masque d’Or lui attribue en 2000 le Prix d’Innovation et le jury des critiques le Prix de la saison théâtrale.
Texte publié aux éditions Les Solitaires Intempestifs.

Vendredi 13 mai 2011 – 20h30
Le Masque de l’Ennemi

D’après Cosmétique de l’ennemi d’Amélie Nothomb // Traduit du français et adapté par Lili Popkhadze et Robert Stouroua
Mise en scène Robert Stouroua
Spectacle en géorgien surtitré en français

Rustaveli National Mask of Foe.JPGL’action commence dans la salle d’attente d’un aéroport. Un retard de vol est annoncé et Jérôme Anguste s’installe pour lire quand un homme – Textor Texel – vient l’importuner. Il ne cesse de parler à Jérôme Anguste qui, pourtant, lui fait clairement comprendre son désir d’être seul. Texel s’avère être un monstre, une sorte de tortionnaire qui prend plaisir à ne pas laisser Anguste tranquille. De flots de paroles en flots de paroles, il avoue avoir emprisonné la femme d’Anguste, vingt ans plus tôt, toute une nuit dans un mausolée du cimetière Montparnasse, puis de l’avoir violée, avant de la tuer à coups de poignard, dix ans plus tard. Après ces effroyables révélations, il propose à Anguste de le tuer. Mais ce dernier, horrifié, appelle la police pour qu’ils arrêtent Texel. Quand les policiers arrivent, ils regardent Jérôme Anguste comme un homme ivre et ne prêtent aucune attention à Textor Texel. C’est à ce moment précis que les choses commencent à devenir étranges. Texel explique à Anguste que les policiers l’ont ignoré car il n’existe pas réellement : en fait, il n’est qu’une partie très différente d’Anguste lui-même. Il poursuit en racontant tout ce qu’il sait de lui, et il en sait beaucoup : Texel essaie-t-il donc de le rendre fou, ou Anguste l’est-il déjà ?
Viol, confinement, torture psychologique, meurtre, troubles alimentaires, suicide, la béance d’être orphelin, l’influence du monstrueux sur soi et les autres, Le Masque de l’ennemi est un spectacle poignant, avec deux jeunes acteurs géorgiens qui entraînent sans détour le public dans le combat de la folie.
Né en 1938 à Tbilissi, le metteur en scène Robert Stouroua est directeur artistique du Théâtre national Chota Roustavéli depuis 1980. Son univers artistique est très varié. Ses productions intègrent de manière harmonieuse la tragédie et la comédie, le mélodrame et la farce politique ; les effets comiques classiques sont suivis de méditations philosophiques, le grotesque et le sarcastique naissent d’un réalisme poussé à l’extrême. Robert Stouroua est connu dans le monde entier pour ses mises en scène souvent qualifiées de « sensationnelles ».