Jovan Divjak (entretiens avec Florence La Bruyère)

Sarajevo, mon amour

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« J’ai défendu Sarajevo contre tous les nationalistes, parce que j’ai cette ville dans la peau ». Ainsi parle Jovan Divjak, 67 ans, officier supérieur de l’Armée populaire yougoslave (JNA) qui a refusé de se ranger aux côtés de Milosevic, Karadzic et Mladic. Bien que né en Serbie et d’origine serbe, Jovan Divjak, qui est en poste à Sarajevo quand la guerre éclate, en 1992, décide de rallier l’embryon d’armée bosniaque qui essaie d’organiser la résistance ;

Hostile à tous les nationalismes, Jovan Divjak va acquérir une immense popularité, la population de Sarajevo le considérant comme l’un des principaux héros de la défense de la ville.

Dans ce livre d’entretiens avec la journaliste Florence La Bruyère, Jovan Divjak, qui dirige maintenant une fondation oeuvrant en faveur des orphelins de guerre, apporte un éclairage nouveau et essentiel sur des points essentiels de la guerre : comment le haut commandement de la JNA s’est-il rallié au nationalisme serbe ? Comment l’Armija bosniaque a-t-elle pu s’organiser ?

Surtout, il n’élude aucune des questions délicates : des hommes de l’Armija ont effectivement commis des crimes qui leur valent d’être inculpés par le TPI. Et le statut d’un officier d’origine serbe n’était pas toujours facile, face aux bandes de « bandits patriotes » de Cevo et de Caco, qui faisaient régner la terreur dans Sarajevo assiégée. Jovan Divjak parle sans fard de sa mise à l’écart officieuse, à partir de 1994, et de la « muslimisation » de l’armée bosniaque, néologisme qu’il retient pour évoquer la prépondérance des cadres d’origine nationale musulmane.

Souvent teinté de nostalgie pour un « âge d’or » yougoslave, ce livre constitue un témoignage essentiel pour comprendre les mécanismes qui ont été à l’oeuvre dans la guerre de Bosnie. Et Jovan Divjak reste l’une des plus grandes figures morales de cette époque difficile...