Robert Hasz

Le jardin de Diogène

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Le narrateur abandonne son pays, pour le pays voisin où l’on parle sa langue maternelle. Mais le sentiment d’être déraciné, de n’avoir nulle part sa place, crée autour de lui une atmosphère pesante. Il écrit pour un journal local, accepte de petits boulots, ce qui permet tout juste de payer le loyer. Peu à peu, il se réfugie dans l’attente...

Extrait

« Diogène secoua la tête.

 Tu ne comprends pas. Les aveugles n’ont pas besoin de la vérité. Ils sont très heureux dans leur monde fallacieux, mais douillet. Qu’est-il arrivé aux voyants qui ont voulu décrire le monde réel aux aveugles ? Qui les a écoutés ?

 Mais les temps changent. Il peut venir une génération qui croira peut-être les voyants.

Diogène leva l’index :

 Eh bien, vois-tu, c’est la première chose que tu dois apprendre : les temps ne changent pas. La mer fait des vagues, mais l’eau reste. Les nuages peuvent avoir la forme de champignons, mais on ne peut pas les manger. L’homme est tel qu’il est né : ou il voit, ou il ne voit pas. Qu’une maison soit construite en brique grossière ou en verre étincelant, au bout de dix, cent, mille ans, le sable dont ils sont faits sera toujours du sable. Que dit l’Ecriture : « Tu es poussière... »

 Ce ne sont que des lieux communs.

 Ne fais jamais fi des lieux communs. Ce sont des vérités pétrifiées. Il faut du courage pour essayer de briser ces pierres. »