Le sous-titre de cet ouvrage – Prijedor, laboratoire de la purification ethnique – nous plonge dans les mécanismes qui ont conduit à l’une des pires tragédies de la dernière décennie en Bosnie, quelque peu occultée depuis par le massacre de Srebrenica.
Ecrit dans un style journalistique clair et accessible, les auteurs mettent en perspective les événements qui ont conduit à la création de ces camps, de la prise du pouvoir des bosno-serbes sur la ville de Prijedor, par la force, en avril 1992, à leur fermeture quelques mois plus tard. Emaillé de nombreux entretiens, ils replacent cette période dans sa perspective historique. Ce livre s’adresse autant aux spécialistes de la Bosnie qu’à ceux qui n’ont pas – ou peu – de connaissances sur la guerre de Bosnie. Et ce n’est pas là la moindre de ses qualités.
Tous ceux qui tentent de comprendre le conflit bosnien savent comme il est difficile d’en déchiffrer les tenants et aboutissants. Sans jamais tomber dans le pathos, Arnaud Vaulerin et Isabelle Wesselingh, en donnant la parole à quelques acteurs bosno-serbes impliqués, apportent des témoignages forts et de nouvelles clefs de compréhension. Les nombreux entretiens de victimes, dont certains sont impressionnants, justifient ce devoir de souvenir et de vérité qui est un des fils conducteurs du livre.
Sans concession, ce véritable travail d’enquête, retrace l’histoire de l’ex-Yougoslavie et surtout l’action de la communauté internationale de 1992 à 2003. Notamment, l’action du tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie, de sa création en 1993 à son fonctionnement actuel jusqu’à ses perspectives futures. La politique internationale au chevet de la Bosnie-Herzégovine est disséquée et la critique présente mais toujours constructive.
Enfin, en s’appuyant sur le cas de Prijedor au travers d’une recherche très complète, les auteurs tracent les pistes d’un avenir en commun pour les différentes communautés bosniennes. Ainsi, en tentant d’ouvrir les portes de l’avenir pour les habitants de Prijedor, ce livre nous impose une lecture qui le rend bouleversant. Un travail de mémoire indispensable.
François-Xavier Delisse