Croatie : coup de balai dans l’audiovisuel public

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Les purges à la radiotélévision croate HRT se poursuivent. L’émission Hrvatska uzivo, souvent critique à l’encontre du gouvernement, a été déprogrammée du jour au lendemain, sans la moindre explication convaincante.

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Par Jelena Prtorić

© CdB / Jelena Prtorić

Sous le slogan « La télévision publique pour tous », quelque 150 personnes ont manifesté vendredi 15 septembre contre la suppression de l’émission Hrvatska uživo (« La Croatie en direct ») devant le bâtiment du Parlement croate. L’émission traitait de sujets de politique et de société en donnant la parole aux minorités, aux ONG et à des personnes issues de milieux non-privilégiés.

Hrvatska uživo a été déprogrammée du jour au lendemain, alors qu’elle figurait dans la programmation d’automne. La direction de la HRT a expliqué son choix par un souci de « répondre aux besoins de téléspectateurs » qui se seraient plaints de trop de contenu politique dans un programme de l’après-midi. L’Association des journalistes croates a estimé qu’une telle explication était sans fond et que « l’émission était, depuis des années, un exemple de ce que le service public devrait représenter, car elle transmettait des informations qui ne pouvaient pas trouver leur place dans d’autres programmes ».

Les journalistes y voient plutôt une nouvelle attaque contre la liberté de la presse. Maja Sever, la rédactrice en chef de l’émission, faisait partie des rares journalistes du service public qui ne craignaient pas d’enquêter sur les élites politiques de droite comme de gauche, de poser des questions difficiles et même de critiquer la gestion de la télévision publique.

Depuis 2016, de nombreux licenciements politiques et la suppression de plusieurs émissions ont eu lieu à la radiotélévision publique croate. La nouvelle direction a ainsi interrompu l’émission satirique Montirani proces, qui n’hésitait pas à critiquer le gouvernement. À l’époque, le controversé ministre de la Culture Zlatan Hasanbegović avait également supprimé plusieurs émissions culturelles et documentaires pour les remplacer par des émissions religieuses.

Depuis, le gouvernement a changé et le pays a un Premier ministre « modéré », Andrej Plenkovic. Mais celui-ci n’a pas changé la politique de l’audiovisuel public : aucune émission supprimée n’a été restaurée, alors que les remaniements, suppressions d’émissions et changements de ligne éditoriale se sont poursuivis dans le service public. Au lieu de l’émission Hrvatska uzivo, un show de divertissement sera diffusé. Quant aux journalistes, ils n’ont toujours pas eu de nouvelles quant à leur avenir professionnel.


Cet article est produit en partenariat avec l’Osservatorio Balcani e Caucaso pour le Centre européen pour la liberté de la presse et des médias (ECPMF), cofondé par la Commission européenne. Le contenu de cette publication est l’unique responsabilité du Courrier des Balkans et ne peut en aucun cas être considéré comme reflétant le point de vue de l’Union européenne.