Blog • L’élection présidentielle en Croatie et ses enjeux européens

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La politique peut-elle avoir encore un pouvoir créatif ? Le social-démocrate Zoran Milanović réitérera-t-il l’exploit d’Ivo Josipović en 2010 ? L’élection présidentielle en Croatie et ses enjeux européens.

Duel télévisé entre Zoran Milanović et Kolinda Grabar-Kitarović, jeudi 2 janvier
(Capture d’écran)

L’espoir est une chose ridicule est le titre d’un roman de l’auteur bosniaque Aleksandar Hemon, émigré aux Etats-Unis dans les années quatre-vingt-dix, roman autobiographique raconte les aventures du réfugié Josef Pronek qui essaye de se faire sa vie à Chicago, avec l’espoir comme seul soutien.

Face à chaque nouveau scrutin électoral, il faudrait avoir de l’espoir, sinon pourquoi sortir de chez soi pour se rendre aux urnes, surtout comme il arrive à la population croate, si cela tombe lors des congés pour les fêtes de fin d’année ? Le premier tour de la présidentielle croate tombait le 22 décembre, le second tour le 5 janvier. En pleine milieu des festivités. Les candidats qui auront à se confronter au deuxième tour : Zoran Milanović, le candidat de gauche et Kolinda Grabar Kitarović, la candidate de droite et Présidente sortante.

L’homme politique engagé de gauche et la femme élégante de la droite, deux stéréotypes que l’électorat croate est appelé à évaluer, mais aussi deux visions différentes de la Croatie et d’une certaine façon de l’Europe aussi.

Les candidats, entre stéréotypes et pragmatisme

Lui, il espère refaire le coup d’Ivo Josipović d’il y a dix ans, lorsque au deuxième tour des présidentielles, le 10 janvier 2010, il remporta la victoire. Ça pourrait être le debout du « swing of the balance », ou du renversement des conditions politiques en Croatie en vue aussi des prochaines élections parlementaires du printemps.

Elle, elle a de son côté le statu quo, en tant que Présidente sortante elle est garantie de la continuité, de la stabilité politique du pays, la représentante du pouvoir constitué et de l’unité de la population en Croatie garantie par le parti qui a conduit le pays à son indépendance.

Au deuxième tour l’électorat devra opter pour l’élimination, parce qu’au premier tour on peut choisir, mais au deuxième on élimine le candidat que l’on n’aime pas. L’électorat pourra se débarrasser du stéréotype qu’il trouve à son goût le plus incombant, ça pourrait être la « femme image » de la droite, la « Barbika » (« poupée Barbie ») comme ses détracteurs la surnomment, ou bien l’abonné au Shadow Cabinet parce que nonobstant quelque exercice de transformisme, notamment la participation à la coalition Kukuriku, il est est rare que la gauche soit arrivé au gouvernement en Croatie.

Toutefois, les deux sont depuis longtemps actifs en politique, et ils devraient être bien connus par la population qui ne devrait pas tomber sous le piège des stéréotypes et savoir ce qu’ils pourront effectivement faire pour le pays, chacun de son côté.

Les enjeux européens de cette élection

Les élections présidentielles croate mettent en jeu aussi, non seulement les questions d’ordre intérieur, mais surtout la future politique extérieure de la Croatie et de l’Union européenne aussi. Le Président de la République croate s’occupe de la politique extérieure nationale, mais, cette fois-ci il se trouvera à participer aussi à l’exercice de la charge collective de guider les activités du Conseil de l’Union européenne en en garantissant la Présidence de l’Union européenne pour la période du premier semestre du 2020.

Le Conseil de l’Union européenne rassemble les représentants des Etats membres, réunis selon le sujet de discussion appelés à prendre des décisions à la majorité qualifiée, simple ou à l’unanimité dans le cas de la politique étrangère et de la fiscalité notamment, afin de participer à la procédure d’adoption d’actes législatifs et de coordonner les politiques européennes.
La tâche n’est pas facile parce qu’elle demande de « construire la coopération et l’accord entre les pays membres de l’Union dans un esprit de consensus et de respect réciproque ».

Les deux candidats avec un passé de coopération avec l’OTAN sont bien placés pour y donner leur contribution, et vu que l’OTAN n’est pas l’Union européenne, à leur rescousse il y a l’actuel premier ministre Aleksandar Plenković, déjà prêt, paraît-il, dans le cas d’un renversement du pouvoir dans les prochaines élections législatives, à briguer une place à Bruxelles.

« A strong Europe in a world of challenges »

« Une Europe forte dans un monde de défis », le motto choisi par la Présidence croate du Conseil de l’UE pour synthétiser les priorités qui seront suivies lors du premier semestre 2020 traduit la nécessité d’une guide forte dans un moment de grands défis, certes il y a le budget 2019-2024 à approuver, mais les véritables défis seront faire face à la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne, donner à l’Union à travers la réforme des institutions de l’Union européenne des instruments aptes à surmonter la crise économiques, le changement climatique et les urgences des flux migratoires.

Les quatre piliers individués dans le document résument ces nécessités, sous le premier « Une Europe qui se développe » on entend un développement équilibré, soutenable et inclusif de l’Union et de ses Etats membres, de ses régions et de ses citoyens. Sous le deuxième : « Une Europe qui met en réseau », la mise en place de réseaux économiques et infrastructuraux au service du potentiel humain de l’Union. Le troisième « Une Europe qui protège » veut garantir une Union plus sûre à travers des contrôles plus efficaces aux frontières extérieures et une politique migratoire et de requête d’asile soutenable et efficace. Et pour finir une « Europe influente », ou une Europe leader global et partenaire fort pour ses voisins. En particulier au sujet des voisins des pays de Balkans occidentaux l’objectif est celui de « continuer une politique d’élargissement crédible et effective, fondée sur une perspective européenne confirmée des candidats et des potentiels candidats de l’Europe du sud-est, et sur la satisfaction complète des critères établis ».
C’est le renouvellement de la promesse faite aux pays des Balkans occidentaux au Sommet de Thessalonique de juin 2003, qui pourrait voir dans le prochain Sommet de Zagreb, du moins dans les intentions de la Présidence, un ultérieur épanouissement.

Quel pronostic électoral ?

Mais avant il faut encore voter pour les présidentielles, et quel sera le résultat ? Prenons d’autres élections, celles en Grande-Bretagne pour le Brexit, à nouveau deux candidats en confrontation les travaillistes et les conservateurs, une date celle du 12 décembre, inattendue pour les habitudes électorales anglaises, un enjeux européen sur le tapis.

Le résultat l’on le connait bien, la population du Royaume-Uni a confirmé le Brexit, parce que dans une époque d’incertitude, de crise économique et de repliement sur soi-même on renonce au changement, on préfère ce que l’on connaît et on s’y attache. Le Royaume-Uni a toujours voulu sortir de l’Union européenne et le voilà contenté, peu importe si l’adhésion a duré presque une cinquantaine d’années. Le risque est que l’électorat croate réagisse dans la même façon en choisissant le connu à la place de l’inconnu, la Croatie a toujours été un pays de droite, pourquoi voter à gauche dans des temps troubles ?

C’est surtout dans les moments difficiles que l’on a plus besoin d’espoir et du pouvoir créatif de la politique. Non plus recourir à la politique comme à un instrument clientéliste pour s’assurer son futur, mais faire de la politique pour s’assurer un futur meilleur pour tous, être au service de l’amélioration des conditions de tous et de la planète aussi. Pour cette raison Greta Thunberg plaît autant, notamment aux jeunes qui trouvent difficile trouver des points de repère dans cette politique et qui essayent de trouver de nouvelles expressions.
L’espoir n’est donc pas une chose ridicule, mais un moyen à l’aide de la politique qui viendrait de la société civile.