Catherine Samary

Yougoslavie, de la décomposition aux enjeux européens

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Dans la défunte Yougoslavie comme dans la plupart des pays de l’ancien « bloc communiste », l’entrée dans la décennie 1990 fut une bifurcation historique majeure. Les nouveaux régimes en pleine mutation issus des premières élections pluralistes, en Europe de l’Est comme dans les républiques yougoslaves, devaient trouver leur place dans l’ordre mondial lui-même en recomposition.

La crise yougoslave marque en Europe une transition d’une rare violence, d’une ère à une autre. Quelle mémoire, quelle compréhension en gardera-t-on ? Comment en sortir ? La stabilisation politique d’après-guerre dépend d’une certaine « vérité » historique et d’une capacité à reconstruire des solidarités socio-économiques. Sur tous ces plans, l’Union européenne élargie a et aura des responsabilités majeures. Voici plus de vingt-cinq ans que Catherine Samary sillonne la région pour en donner des clés de compréhension essentielles. Ce recueil regroupe des articles tels qu’ils ont été écrits au long de cette période d’éclatement de la fédération de 1991 à 2006, toujours à l’oeuvre aujourd’hui, avec leurs questionnements en temps réel...

Ils ont en commun d’avoir cherché à mettre en évidence des interprétations du passé et du présent ouvertes sur d’autres possibles, rendant compte de points de vue et de résistances qui ont été étouffés au sein des sociétés concernées.

Catherine Samary réédite ses articles déjà parus dans le Monde diplomatique et Inprecor (revue du secrétariat unifié de la quatrième Internationale) depuis 1991. Dans son introduction elle critique les « médias occidentaux qui ont souvent versé dans présentation ethnicisée des conflits » et présente son recueil comme « une résistance à ces pressions et simplifications » (p. 15).

La postface est signée par Edgar Morin, qui rappelle notamment son propre engagement protitiste lors de l’excommunication soviétique à la fin des années 1940. Dans sa conclusion ce philosophe dont la famille est originaire de Thessalonique (il en parle très joliment dans Vidal et les siens, 1re éd. 1989) écrit :

« Je suis de ceux qui pensent qu’en dépit de sa stagnation politique, l’unité européenne telle qu’elle est, en englobant les divers morceaux de l’ex-Yougoslavie, est la seule voie pour permettre à Croatie, Serbie, Bosnie de recommuniquer. Tous les espoirs de confédération balkanique sont actuellement morts, mais c’est au sein d’une Europe élargie que pourront se constituer des relations particulières interbalkaniques... » (P. 190.)

Certains ne manqueront de trouver cette conclusion trop optimiste. Pour ma part, je ferais remarquer qu’elle est autrement plus réconfortante que les lamentations souvent hypocrites sur le thème de la disparition de la Yougoslavie.

Ce livre nous dit qu’il n’y a pas plus de fatalisme balkanique que d’impossibilité d’imaginer une autre Europe permettant à ses peuples de vivre mieux ensemble...

Collaboratrice du « MondeDiplomatique »,Catherine SAMARYest maître de conférence à ParisDauphine, associée à l’Institut d’Études européennes de Paris 8. Chercheur à l’IRISES/Dauphine, elle est également l’auteure de plusieurs ouvrages sur l’ex-Yougoslavie, dont « Les conflits
yougoslaves de A à Z », avec Jean-Arnaut Dérens aux éditions de l’Atelier.

Postface d’Edgar MORIN
192 pages au format 14 x 21 broché

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