Irina Nicolau

Vagabondages dans les Balkans. Une incursion subjective au pays des Aroumains

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Ethnologue roumaine récemment disparue, Irina Nicolau rend hommage à son père, de souche aroumaine, dans un précieux petit livre, mêlant souvenirs personnels, histoire et ethnologie.

Les Vlachs, ou Aroumains, sont assurément les grands oubliés de l’histoire balkanique. Ce « peuple caméléon » a tendance à se fondre dans les autres peuples orthodoxes vivant à ses côtés. Les Aroumains étaient établis en Macédoine, en Grèce, en Albanie, en Serbie, en Bulgarie. Les dernières communautés qui se définissent comme aroumaines ne regroupent plus que quelques milliers de personnes. Bergers transhumants rompus à tous les métiers, les Aroumains sont parfois devenus d’immensément riches marchands ou financiers, se faisant connaître par la munificence de leur générosité. Plusieurs des plus grands bâtiments d’Athènes doivent leur origine à des mécènes aroumains.

Hormis quelques mythes, comme le souvenir de la ville de Moskopolje (aujourd’hui Voskopojë, en Albanie), rasée par le terrible Ali Pacha de Tepelen en 1788, la mémoire des Aroumains disparaît peu à peu. Irina Nicolau écrit avec justesse : « je m’imagine les Aroumains comme une ethnie paradoxale qui a brillé intensément dans la nuit du Moyen Âge et qui, depuis deux siècles, s’éteint lentement au fur et à mesure qu’elle entre dans le cône de lumière du présent ». À l’heure où l’on abuse du concept d’ethnie dès que l’on parle des Balkans, ce livre est essentiel pour comprendre comment les sentiments d’appartenance collective se forment et disparaissent dans la péninsule balkanique.