Blog • Poèmes de Vasil Čaprazov

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Vasil Čaprazov, poète bulgare rom né en 1945, est aussi journaliste et intellectuel. Poèmes extraits de L’été tsigane-indien („Циганско лято“, Éditions Stigmati, 2005) et de Je voudrais que le jour se lève („Искам да се съмне“, Éditions Stigmati, 1996)

Vasil Čaprazov.
© rakobg.com

*

Идвам си, мой дом,
мой Амритсаров храм,
величие неосветено със победи,
с неистов труд,
безумност или сила.
При тебе се завръщам –
плам от огън тлял
в разкоша на безимието.
При тебе съм –
незрим, недосегаем,
прободен с триста ножа,
нераним.
Сега съм само аз,
безмерно твой,
обичан и забравен,
и роб, и цар.
Слово мое, Амритсар,
прокуда от безмълвие.

*

Je rentre, mon chez-moi,
mon temple d’Amritsar ,
grandeur que n’éclaire aucune victoire,
personne ne s’y est tué à la tâche,
personne n’y a perdu la force ou la raison.
Je reviens à toi,
telle la flamme d’un feu qui couve
dans le luxe de l’anonymat.
Je suis auprès de toi,
invisible, intouchable,
transpercé par trois cents couteaux,
invulnérable.
Désormais, il n’y a plus que moi,
infiniment à toi,
aimé et oublié,
esclave et roi tout à la fois.
Mon verbe, Amritsar,
exil dans le silence.

ЦИГАНИ

Времето уплашено се взира
в тъмните им пламенни очи,
в дързостта си сетен ход набира
и утихва в черните им дни.

LES TSIGANES

Le temps vous les dévisage, apeuré,
de ces prunelles ardentes foncées
son audace à lui fait s’abreuver
puis s’éteindre leurs noires journées

Vassil Tchaprazov par lui-même, sur la quatrième de couverture de L’été tsigane-indien : « Je suis de Sliven, le point d’attraction du vent, des cloches et des Tsiganes, le berceau de trois points de référence bulgares : la poésie, le textile et l’insoumission. Je suis rom ». („От Сливен съм. Пъпа на вятъра, камбаните и циганите. Люлка на три български начала – поезия, текстил и бунтарство. Ром съм“). En Bulgarie, et sans doute ailleurs également, les Roms utilisent deux termes dans leur langue, le romani, pour s’autodésigner : 1) Tsiganes, au sens de membres de la communauté tsigane ; 2) Roms, au sens de gens ayant la même origine ethnique que les premiers, partageant la même langue, mais qui ne font pas nécessairement partie de la communauté tsigane (notamment parce qu’ils sont mieux intégrés dans la collectivité nationale bulgare en raison de leur niveau d’études ou de leur statut social). En ce sens, il est possible d’être rom sans être tsigane, mais non l’inverse. Il est faux, comme on le croit souvent en Bulgarie, que « Rom » serait un terme récent introduit par des organisations non gouvernementales puisque le mot a toujours existé sinon en bulgare, du moins en romani (Ndt.)