Blog • Un « spécial Kosovo » par des étudiants en journalisme de Sorbonne Université

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Les jeunes journalistes s’intéresseraient-il de plus en plus aux Balkans ? Après l’Arménie en 2018, le Sénégal en 2019, une promotion d’une trentaine d’élèves du CELSA [1] de Sorbonne Université à Paris, s’est rendue au Kosovo en février 2020. A l’actif de ces jeunes professionnels, un florilège de reportages sur la vie quotidienne de ce jeune pays d’Europe. Les articles sont à découvrir sur leur blog lechosovo.fr consultable pendant un an.

Accompagnés de trois journalistes français, d’un technicien audiovisuel et de la responsable de leur master2, ils sont une trentaine d’étudiants à débarquer pour la première fois à Prishtina. Ils ont choisi le Kosovo parce que « c’est un pays qui demeure encore méconnu, non reconnu par une centaine de pays. Une situation qui complique la vie des Kosovars. »

Un seul objectif pendant huit jours : se mettre en situation professionnelle pour mobiliser compétences techniques et éditoriales et s’interroger, choisir des sujets, établir des contacts, produire des reportages accompagnés de photographies et de vidéos réalisées et intégrées.

Au contact du terrain

Les reportages se succèdent autour de plusieurs grands thèmes : Pouvoirs, Identités, « KosoVie », Demain ou encore « Kulturë ». Accueillis par les départements de français et de journalisme de l’Université de Pristina, les jeunes français ont l’opportunité de rencontrer et d’échanger avec les enseignants et les étudiants kosovars avant de s’aventurer dans tous le pays.

Tourisme et économie sont intimement liés pour accompagner le développement du pays. Qui a jamais entendu parler à Paris de StoneCastle ? Le vin kosovar produit « à l’américaine » au cœur de la ville de Rahovec à 50 km de la capitale ? StoneCastle est le plus gros producteur de vin du Kosovo et, depuis sa privatisation en 2006, la propriété d’une famille de la contrée qui applique des méthodes de commercialisation importées des États-Unis pour se développer à l’international.

À Prishtina, les écoles d’allemand fleurissent. Elles sont particulièrement fréquentées par les jeunes médecins qui préparent leur départ. Sur les 300 derniers diplômés de la faculté de Pristina, 200 espèrent quitter le Kosovo pour se rendre en Allemagne où les docteurs manquent. L’Allemagne est la terre promise de bon nombre de médecins kosovars.

Dans la rubrique « Kulturë », plusieurs articles s’intéressent à la question du patrimoine urbain et de sa conservation. C’est notamment le cas de Prizren [2], surnommée « La Perle des Balkans », deuxième plus grande ville du Kosovo à 80 km de la capitale, qui séduit de plus en plus de touristes. Chaque année, elle accueille 30.000 voyageurs, venus apprécier son patrimoine historique et culturel.

De son côté, la capitale du Kosovo jouit d’un patrimoine architectural riche, témoin des époques historiques qu’a connues la ville. Mais les vagues de destructions urbaines qui l’ont affectées, depuis la fin de la Seconde Guerre Mondiale, ont profondément altérées son visage.

Dans le vieux Prishtina, le projet « Rue modèle » imaginé par le bureau au Kosovo de Culture Heritage Without Border cherche à mettre en valeur les quelques maisons historiques encore debout tout en dynamisant l’économie d’une rue commerçante. Il rencontre de nombreuses difficultés comme d’autres programmes de rénovation précédents attachés à la préservation du patrimoine ottoman. Dès 2014, Patrimoine Sans Frontière et le bureau au Kosovo de CHwB avaient tiré la sonnette d’alarme sur l’état du patrimoine urbain de Prishtina qui, s’il venait à disparaître, entraînerait avec lui tout un pan de son histoire.

Aller au-delà des tabous

Dans la rubrique « Identités », plusieurs articles parmi lesquels un sur le symbole d’unité pour tout le Kosovo de « Mère Teresa », un modèle pour la petite communauté chrétienne et une figure pour le rayonnement du pays dans le monde entier. La minorité catholique kosovare tente de préserver son identité dans un pays où elle représente 3% de la population. À Prishtina, en face de l’université, la cathédrale « Mère Teresa », consacrée en 2010, représente un symbole fort pour les catholiques kosovars dans un pays qui pratique la pluralité des cultes mais où il n’est pas forcément facile de trouver un conjoint qui partage la même confession.

Les jeunes reporters français partent aussi à la rencontre des acteurs de la société civile. Dans un article consacré aux victimes de viols, ils vont à la rencontre de l’ONG Medica Gjakova qui propose thérapies de groupe et suivi psychosocial et juridique aux victimes de viols pendant la guerre. Un autre sujet tabou, celui des transgenres, minorité au sein même de la minorité LGBTI du Kosovo, prend la forme d’une enquête auprès des deux personnes qui ont rendu public leur transition de genre. La question des violences conjugales est également cruciale dans une société où quatre femmes sur dix en sont victimes. Associations, ONG et refuges dénoncent l’inaction des institutions, notamment dans la ville Peja où la directrice du refuge pour femmes battues témoigne de leurs difficultés à prendre leur indépendance dans une société encore très patriarcale.

Les acteurs de ce « Spécial Kosovo »

La rédaction : Nessrine Ali Ahmad, Alice Anceline, Elsa Assalit, Valentin Berg, Sylvia Bouhadra, Lise Boulesteix, Constance Cabouret, Auguste Canier, Alexandre Cool, Thomas Coulom, Cécile Da Costa, Audrey Dugast, Antonella Francini, Clara Gilles, Poutchie Gonzalez, Adrien Grange, Albane Guichard, Yann Haefele, Vincent Jaouen, Samuel Kahn, Camille Kauffmann, Esther Michon, Rasha Miled, Blandine Pied, Colin Gruel, Fanny Rocher, Sébastien Rouet, Jeanne Seignol, Simon Tachdjian, Timothée Talbi, Iris Tréhin, Bertille Van Elslande.

L’encadrement pédagogique : Stéphane Béchaux (journaliste indépendant), Alain Guillemoles (La Croix), Ivan Valerio (BFMTV).

L’encadrement technique : Thibaud Vanderstraeten.

À la direction du master : Valérie Jeanne-Perrier.

Le voyage s’est conclu par une présentation de leur travail et de leurs découvertes, à l’Alliance Française de Pristina.

Notes

[1L’École des hautes études en sciences de l’information et communication, plus connue sous le nom de CELSA, fait partie de Sorbonne Université née du regroupement des universités de Paris-Sorbonne (Paris-IV) et de Pierre-et-Marie-Curie (Paris VI) en 2018.

[2A lire un article documenté sur la présentation du numéro de la revue Art et Tradition consacré à Prizen : http://association-albania.com/Albania-le-patrimoine-de-Prizren.html