Toi au moins, tu es mort avant

1947.
À peine sortie de la guerre, la Grèce est tombée dans le chaos. La droite, installée au pouvoir par les Anglais, et les forces de gauche s’entre-tuent dans un pays dévasté. Chrònis Mìssios, dix-sept ans, résistant communiste, est arrêté puis condamné à mort. Gracié de justesse, torturé plusieurs fois, ballotté de prison en déportation, il va devenir, selon ses termes, un « prisonnier professionnel » : à sa libération définitive, en 1973, il aura passé en tout vingt et un ans de sa vie en détention.
Cette histoire du prisonnier Mìssios, c’est lui-même qui la raconte, pendant toute une nuit, dans un déferlement de mémoire où les époques se bousculent, à l’un de ses camarades qui, lui, par chance, est « mort avant » – avant d’avoir connu la prison, mais aussi le pire : le naufrage de l’idéal communiste. C’est la première fois que la guerre civile grecque est racontée ainsi. Ce récit a le souffle de l’épopée, le rayonnement des grands livres.
Né à Kavala en 1930, Chrònis Mìssios rejoint l’Armée démocratique urbaine à l’âge de dix-sept ans. Plusieurs fois arrêté et condamné à mort à partir de cet âge, il a connu toutes les tortures. Au total, il a passé plus de vingt années en prison et déportation, de 1947 – en pleine guerre civile – jusqu’à la fin de la dictature des colonels en 1974, quand il a bénéficié d’une amnistie. Il est mort en 2012.
Préface et traduction du grec de Michel Volkovitch.