Blog • Scènes de vie aux alentours de Monastir (Bitola) pendant la Grande Guerre

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Tout couleur, format à l’italienne, plus narratif que la caricature du début du XXe siècle, pas encore la BD à venir, un beau livre drôle et curieux de surcroît, au titre un peu énigmatique : La Macédoine sous la Montagne bleue mais dont le sous-titre est explicite : campagne d’Orient 1917-1918 : Jean Peyrissac, aux éditions Michalon.

Le four à pain

En fait, il s’agit de vingt-trois gouaches réalisées par un jeune soldat français débarqué via Salonique dans la région de Monastir, aujourd’hui Bitola, au pied du mont Pelister, contrée martyrisée par des combats féroces opposant des troupes françaises, anglaises et serbes à des troupes bulgares et allemandes. Leur auteur, Jean Peyrissac (1895-1974), les a proposées en 1919 à un éditeur, Devambez, qui ne les a pas publiés comme prévu, la souscription lancée n’ayant pas donné les résultats escomptés. « On essayait sans doute d’oublier la guerre à l’époque », fait remarquer sa petite-fille Stéphanie Fauconnier Peyrissac qui a déjà consacré une monographie et un catalogue raisonné de l’œuvre de son grand-père, devenu plus tard un artiste réputé, et qui publie ici pour la première fois ces planches.

Il est question dans l’album surtout des paysannes et paysans et autres popes macédoniens, appelés en ce temps bulgares par leurs voisins, parfois des Turcs, contraints à l’exode, mais jamais des Aroumains (Vlassi pour les slavophones, Vlachos pour les grécophones) pourtant bien présents comme commerçants et artisans au coeur de Monastir/Bitola et surtout dans le massif montagneux des alentours avec leurs troupeaux de moutons… « Le titre ‘’Sous la Montagne bleue’’ évoquera pour les Bulgares les chants traditionnels de leur enfance, lit-on dans l’avant-propos. » Je n’ai pas pu le vérifier, en revanche, je ne vois pas comment ces gouaches pourraient témoigner de « l’histoire des populations montagnardes et nomades en Macédoine » comme on peut le lire dans la présentation (p. 5). Evidemment, cela n’enlève rien à l’intérêt que présente ce très bel album…

La Grande Guerre marquera durablement cette région longtemps située au cœur de la Turquie d’Europe. La population de Monastir/Bitola - dont on disait qu’elle avait le plus grand nombre de pianos par rapport au nombre d’habitants - passera de 55 000 habitants en 1915 à 20 000 en 1918.