Classement RSF de la liberté de la presse : les Balkans stagnent, la Serbie s’effondre

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Cette année encore, le classement 2019 de la liberté de la presse dévoilé par Reporters sans Frontières (RSF) dresse un bilan inquiétant pour tous les pays des Balkans, notamment l’Albanie, la Bulgarie, la Moldavie ou le Monténégro. Toutefois, c’est en Serbie que la situation s’est le plus dégradée ces douze derniers mois, avec « de nombreuses atteintes à l’intégrité physique des journalistes ».

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Carte de la liberté de la presse
© RSF

Les pays des Balkans continuent de stagner dans les bas-fonds du classement de la liberté de la presse, publié chaque année par l’organisation Reporters sans frontières, à l’exception notable de la Macédoine du Nord, qui gagne 14 places pour se hisser à la 95e position sur 180. « En matière de sécurité des journalistes, de nets progrès ont été réalisés : il y a eu trois fois moins d’attaques contre des reporters en 2018, mais la culture de l’impunité reste bien ancrée en Macédoine », note le rapport, en déplorant « une pratique bien enracinée de menaces et d’intimidations de la part de hauts fonctionnaires du gouvernement à l’encontre des journalistes ».

Le meilleur élève de la région est toujours la Slovénie (34e position), qui se classe juste après la France et le Royaume-Uni, suivie un peu plus loin par la Roumanie (47e), où l’on note « une censure politique croissante et une hausse de l’autocensure au sein des rédactions ». La situation n’est pas meilleure dans les autres pays de la région, notamment en Bosnie-Herzégovine (63e), où « les divisions ethniques se ressentent dans les lignes éditoriales des médias, et [où] les discours de haine sont de plus en plus présents ». En Republika Srpska, RSF explique que les autorités « limitent sérieusement la liberté de manifester et la couverture des manifestations », notamment celles qui se déroulent pour demander que la lumière soit faite sur la mort du jeune David.

Viennent ensuite la Croatie (64e) et la Grèce (65e). Dans le premier de ces deux pays, qui gagne cinq places au classement, l’organisation explique que « les journalistes enquêtant sur la corruption, le crime organisé et les crimes de guerre sont souvent victimes de campagnes de harcèlement » et que la télévision publique (HRT) reste sous le contrôle étroit du pouvoir. Dans le second, qui progresse de neuf places, des progrès sont à noter, notamment « l’abolition de la procédure de la ’comparution immédiate’ pour les délits de presse ».

Moldavie, Monténégro et Bulgarie en queue de peloton régional

En queue de peloton, le Kosovo (75e), où l’instabilité chronique de la situation politique en 2018 n’a pas contribué à une amélioration de la liberté de la presse, et l’Albanie (82e), qui perd huit places, avec un constat dramatique : « Les médias n’ont jamais été autant attaqués par le gouvernement ou les réseaux criminels qu’en 2018 ». Ce climat délétère est notamment entretenu, selon l’organisation, par les responsables politiques du pays et le « Premier ministre en tête ». La Moldavie (91e), le Monténégro (104e) et la Bulgarie (111e) sont toujours les bons derniers de la région, et la situation ne semble pas s’y arranger, notamment avec le meurtre de la journaliste bulgare Viktoria Marinova.

Toutefois, c’est la Serbie qui effectue la chute la plus spectaculaire, en régressant de quatorze places, pour s’établir à la 90e position mondiale. « Cinq ans après qu’Aleksandar Vučić a pris les rênes de la Serbie en tant que Premier ministre puis en tant que Président, exercer le journalisme dans le pays n’est plus une activité ni sûre ni encouragée par le pouvoir en place », explique Reporters sans frontières. « De nombreuses atteintes à l’intégrité physique contre des journalistes ne sont ni instruites ni résolues, et les campagnes de diffamation agressives que les médias pro-gouvernementaux orchestrent contre les journalistes d’investigation battent leur plein ».

Enfin, la Turquie reste scotchée à la 157è place mondiale, le rapport rappelle que la « chasse aux médias critiques menée par le gouvernement de Recep Tayyip Erdoğan culmine depuis la tentative de putsch du 15 juillet 2016 », et que « l’étau se resserre sur tout ce qui reste de pluralisme : une poignée de titres harcelés et marginalisés ».