Mix • Dayton25 : 1995-2020, 25 ans de révoltes en Bosnie-Herzégovine

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Que s’est-il passé sur les scènes de Bosnie-Herzégovine depuis que les armes se sont tues ? Que s’est-il passé dans les bars, les petites salles, les festivals, les sous-sols, les cours improvisées en mini-scènes de concert ? Pour assembler cette playlist 1995-2020, nous avons fait appel à notre « raja » bosnienne. Quatre proches venus des quatre coins du pays, certains l’ont quitté, d’autres y vivent toujours.

Des quarantenaires qui se sont battus pour soutenir, à bout de bras le plus souvent, une culture indépendante aujourd’hui mal en point. Voilà leur rétrospective en dix titres emblématiques, autant de témoignages d’une scène musicale diverse, enragée et emprunte d’une puissante ironie. Kaléidoscope d’une Bosnie-Herzégovine créative et vivante.

1. Damir Avdić – Mrtvi su mrtvi (2008)
Le grand Damir Avdić, performer de génie, parolier indomptable. Un titre emblématique, les morts sont morts, il fallait s’en préoccuper quand ils étaient vivants.

2. Protest – Sarajevo Feeling’93 (1997)
Formé dans les années 1990, Protest était l’un des groupes phare du punk post-guerre à Sarajevo jusqu’à sa séparation en 2009. Cette chanson raconte sur un ton sarcastique le quotidien de la capitale bosnienne durant le siège.

3. Unutrašnja Emigracija – Mlade na liste (2006)
Groupe d’anarcho-punk originaire de Prijedor, UE a joué partout en ex-Yougoslavie entre 2005 et 2010. Mlade sa liste (Les jeunes sur la liste) parle de la terreur des campagnes électorales bosniennes et de l’impossibilité de transformer la société par le seul vote.

4. Skroz - Nisam jeo (deset dana) (2000)
Groupe de rock né à Sarajevo immédiatement après la guerre, Skroz compte trois albums à son actif et a trainé sa (légère) dépression sur bien des scènes des Balkans.

5. KZU Ole Ole PZU Oje Oje - Svak je sjeban na svoj naćin (2010)
Joyeux drilles de Travnik pratiquant la dérision et l’ironie emballées dans une pop décalée, KZU dégomme la réalité bosnienne à grand coups de fausse rigolade.

6. Mara – Otvori se i diši (2017)
Voilà le morceau le plus récent de cette playlist. Une pop-folk lyrique, des mélodies ciselées sur mesure pour la voix unique de Sanel Marić Mara, chanteur de Mostar accompagné par un groupe de musiciens navigant entre jazz, pop et rock.

7. Adi Lukovac i Ornamenti – Bolest (1999)
Adi Lukovac, pionnier génial de l’électro bosnienne avec son groupe Ornamenti (Les ornements), formé en 1992 au moment où le pays basculait dans la guerre. Il avait fondé un label, Post war sounds, et sorti un album, Pomjeranja, dont même John Peel était tombé amoureux. Au point d’en diffuser des morceaux sur la BBC alors que le disque n’était pas disponible en Angleterre. Sa mort accidentelle en 2006 a laissé toute une génération orpheline, frustrée d’avoir perdu ce talent en pleine maturation.

8. Vuneny – One man one coffee (2004)
Groupe électro de Mostar, Vuneny a tourné dans toute l’Europe dispensant des sets denses, expressionnistes et extrêmement groovy. En 2009, cinq ans après ce One man coffee, leur album Whatever Singularity était sorti sur le label lyonnais Jarring Effects.

9. Defence – Nema ljubavi u centru grada (2006)
Originaire de Tuzla, Defence a d’abord été un groupe de hardcore (et le premier du rappeur Edo Maajka), avant d’évoluer musicalement jusqu’au reggae - un style qu’ils ont contribué à populariser dans la Bosnie indépendante, pavant le succès de Dubioza Kolektiv. Groupe de scène solide et légendes dans leur ville natale, leur album Baga Music comporte quelques hymnes, dont ce « Il n’y a pas d’amour dans le centre ville ».

10. Edo Maajka – Ja odo krast (2008)
Faut-il vraiment présenter le Prince du rap bosnien dont la voix et les textes ont largement débordés des frontières bosniennes ? Chroniqueur du quotidien de la région depuis 20 ans, nous clôturons cette playlist avec ce titre « Je vais me mettre à voler » face aux magouilles des riches criminels bosniens jamais vus, jamais pris.