Balkans, la rentrée du bon pied (2/5) | Macédoine du Nord : un potager à l’école, laboratoire du manger sain

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À Skopje, plusieurs écoles primaires se sont lancées dans le programme « Jardins scolaires : salle de classe du futur » de l’ONG Slow Food. Un projet qui touche à l’éducation, l’écologie, la santé. Et qui remporte un franc succès auprès des écoliers et des enseignants. Reportage.

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Par Jaklina Naumovski

Le potager de l’école Krste Misirkov, à Singelikj (banlieue de Skopje).
© Jaklina Naumovski / CdB

C’est lors de la Journée mondiale de l’alimentation, le 16 octobre dernier, que les résultats du projet « Jardins scolaires : salle de classe du futur » ont été présentés au public. Nous sommes à l’école élémentaire Krste Misirkov de Singelikj, dans la banlieue de Skopje, il fait beau et les enfants expriment toute leur créativité devant les invités présents. Une farandole de personnages créés à partir de fruits et légumes trônent sur les stands, le buffet entièrement préparé par les enfants, avec l’aide de chefs cuisiniers de l’ONG Slow Food Vodno, ravit les papilles du ministre de l’Agriculture et du maire de la municipalité de Singelikj, mais pas qu’eux ! Les stands de dégustation de produits bios ne désemplissent pas. L’occasion de faire découvrir la fierté de l’école : le potager, créé et entretenu par les élèves.

Le projet a été initié en 2013 par l’ONG Slow Food Vodno. Sa présidente, Vasilka Stefanovska, en raconte la genèse : « Le jardin scolaire est un projet créé par Slow Food International (SFI) et fait partie des activités éducatives prioritaires de l’organisation. En 2013, le tout premier jardin a vu le jour au lycée hôtelier Lazar Tanev où j’enseignais, avec le soutien financier de SFI ». En 2018, la mairie de Skopje donne l’opportunité au projet de se développer. « Plusieurs écoles de la ville ont été démarchées. En fonction de leur intérêt et des activités possibles, dix écoles ont été sélectionnées, les enseignants ont été formés, nous avons créé trois manuels, un calendrier annuel des travaux de jardinage et un cahier de travail destiné aux élèves », explique Vasilka Stefanovska.

Slavica Zafirovska, institutrice à l’école Krste Misirkov, se rappelle la rentrée 2018. « La directrice nous a réunis et nous a annoncé que notre établissement avait été choisi par la municipalité pour réaliser ce projet. » Sa mission consiste à organiser et coordonner les activités. Le jardin scolaire prend tout son sens, car l’établissement dispose d’un grand espace vert pouvant accueillir ce « coin potager ». L’équipe pédagogique y a vu une opportunité de « sortir les enfants des bancs de l’école » pour mettre en pratique ce que l’on apprend en classe. Pour l’institutrice, « il est important d’éduquer les élèves sur la manière de consommer des aliments sains et de leur permettre d’acquérir de manière différente des connaissances sur presque tous les sujets du programme scolaire – mathématiques, macédonien, sciences naturelles, enseignement technique, art plastique, etc. » Une approche très concrète via des activités ludiques.

© Jaklina Naumovski / CdB

Interrogés pendant la préparation des plats, les élèves transformés en chefs cuisiniers s’enthousiasment de pouvoir montrer leur savoir-faire : « Moi, j’adore préparer la soupe, en plus si c’est avec les légumes du jardin c’est encore mieux », lance Petar. « Moi, tartiner les toasts de houmous fait maison ça m’amuse, car on en a toujours sur les doigts à la fin », renchérit Marija. « Qui veut devenir chef cuisinier quand il sera grand ? », demande-t-on aux enfants : « Moi, moi, moi ! » répondent en chœur plusieurs d’entre eux. Des vocations sont peut-être nées ce jour-là.

Après les activités d’aménagement de l’espace et les conseils sur les semis dispensés par Katerina, jeune bénévole de Slow Food Vodno, les élèves de la classe CM2 de Slavica Zafirovska sont fiers de faire découvrir leur beau potager où tomates, poivrons, petit pois et autres plantes aromatiques poussent sous la serre. « Tous les élèves sont impliqués et certains de nos petits jardiniers sont activement engagés au quotidien pour surveiller l’évolution de nos plantations », se ravit l’institutrice.

Les élèves expliquent aux visiteurs ce qu’il y a dans leur jardin. Un enthousiasme et une joie visibles lorsque nous leur demandons de nous aider à planter les noisetiers : chacun se passe la pelle à tour de rôle pour mettre du fumier dans les trous avant d’y poser le jeune arbre. L’automne est là et l’équipe pédagogique réfléchit au moyen d’entretenir et de planter des végétaux pouvant braver la rudesse de l’hiver.

La plantation de noisetiers.
© Jaklina Naumovski / CdB

Vasilka Stefanovska est enchantée de constater un tel intérêt des jeunes pour ces activités : « Quel bonheur de voir ces enfants participer à ce projet », s’enthousiasme Vasilka Stefanovska. « Cela prouve que si nous leur donnons l’exemple et suscitons leur intérêt, ils y adhèrent immédiatement. Il faut mettre de l’interactivité dans les cours et intégrer cette forme d’enseignement dans les programmes scolaires ». Le projet sera-t-il répliqué dans d’autres écoles et villes du pays ? « Nous avons répondu deux années de suite à des appels à projet auprès du ministère de l’Environnement, mais nous n’avons malheureusement pas été sélectionnés. Or, pour mettre en place de tels projets, nous avons besoin de financements. C’est ce qui nous bloque dans notre démarche de développement vers d’autres villes du pays », déplore la présidente de Slow Food Vodno.

Le buffet préparé par les élèves.
© Jaklina Naumovski / CdB