Bulgarie : les citoyens se lèvent contre la pollution des centrales à charbon

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Le gouvernement bulgare a ordonné la fermeture temporaire d’une centrale à charbon qui pollue trop, mais il n’arrive toujours pas à s’attaquer à la centrale thermique Brikel, celle qui pollue le plus. Mardi, des habitants excédés ont manifesté.

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Par la rédaction

Mardi 13 septembre, manifestation contre la pollution devant la centrale à charbon Brickel.
© dir.bg

Le gouvernement bulgare par intérim a ordonné la fermeture temporaire de la centrale à charbon Maritsa 3, à Dimitrovgrad. En cause, le niveau excessif d’émission de dioxyde de soufre dans l’air enregistré depuis vendredi 9 septembre. La situation était « critique », a jugé la ministre de l’Environnement Rositsa Karamfilova, ajoutant que la Bulgarie risquait procès et amendes de l’Union européenne pour ses manquements à maintenir la qualité de l’air à un niveau sûr.

La ministre a indiqué que la centrale – propriété d’un groupe américain – ne rouvrirait que lorsque les autorités auraient les garanties que la législation environnementale serait respectée. Elle a également ordonné des inspections quotidiennes de la centrale à charbon Brikel, établie non loin de là, à Galabovo.

La centrale Brikel et le magnat Hristo Kovachki

C’est en effet surtout cette centrale qui pose problème. Depuis des années, les habitants se plaignent de la pollution. « Les habitants des environs doivent constamment nettoyer leur jardin, les voitures et surtout l’intérieur de leur maison à cause de la poussière noire », rapporte Meglena Antonova, de Greenpeace Bulgarie. « Nos murs sont noirs, nos jardins sont noirs, le pare-brise de nos voitures est noir tous les matins et il faut utiliser les essuies-glaces », explique Vesela Georgieva, une habitante de Galabovo, dans un reportage de Radio Free Europe. Quand elle ouvre la fenêtre de sa cuisine, la pièce est couverte de poussière noire en seulement quelques minutes. Plus grave, trois de ses quatre fils ont développé des maladies pulmonaires quand ils étaient bébés. « On marche dans la saleté, on respire de la saleté. »

Pour mettre la pression sur les autorités, des habitants ont manifesté mardi 13 septembre devant la centrale, avec le soutien de Greenpeace Bulgarie et l’ONG environnementale Za Zemiata (Pour la Terre). « Il est temps pour tous les citoyens qui veulent s’exprimer sur la pollution de l’environnement de sortir de Facebook et d’exprimer leur mécontentement au siège de l’entreprise [qui possède et gère la centrale électrique] », ont lancé les organisateurs dans l’appel à manifester. « Les demandes sont : modernisation des infrastructures ou fermeture. »

« La santé des habitants de Galabovo et des villes voisines ne peut être l’otage d’intérêts financiers privés », ont souligné les manifestants. Selon eux, tous les organes de contrôle de la pollution reconnaissent que la centrale Brikel viole en continu les règles environnementales mais que les sanctions sont inefficaces pour obliger la direction à se conformer aux normes. Ils estiment que les installations de la centrale, mise en service en 1962, sont obsolètes et que la pollution est si évidente qu’elle se voit et se sent dans un rayon de plusieurs kilomètres autour de la centrale.

La centrale à charbon de Brikel, en 2020.
© Stefan Nikolov

Parce qu’elle pollue trop, l’ancien gouvernement de Kiril Petkov, en place jusqu’en juin dernier, avait ordonné la fermeture de Brikel, mais un tribunal a bloqué la décision début août, le juge arguant que la centrale faisant partie des « objets stratégiques d’importance pour la sécurité nationale », même si la centrale ne fournit que 1% de l’électricité du pays. Le 19 juillet, Kiril Petkov a personnellement visité le site et déclaré que les niveaux de dioxyde de soufre étaient quinze fois au-dessus de la limite légale.

Brikel emploie 1200 personnes à Galabovo sur les quelque 8000 habitants que compte la ville, et produit de l’électricité et des briques. Elle est la propriété d’une société établie au Royaume-Uni qui détient d’autres centrales en Bulgarie, toutes liées à l’empire industrielle du magnat de l’énergie bulgare Hristo Kovachki. Selon les gestionnaires de Brickel, Hristo Kovachki n’est officiellement que « consultant » pour la centrale.

« Il est temps que ceux qui violent la loi soient tenus responsables », a déclaré l’ONG Za Zemiata, qui qualifie de « féodale » la situation dans laquelle ceux qui souffrent de la pollution sont simultanément dépendants de l’entreprise pour leur gagne-pain.