Blog • Citoyenneté et culture globales : à quand des écrivains « Balkopolitains » ?

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En 1970, Albert Hirshman proposait un mécanisme simple pour expliquer la rélation entre citoyen et Etat nation [1]. Le mécanisme était composé de trois réactions possibles : la sortie (exit, par exemple l’émigration), la remontrance (voice, par exemple la protestation) et la loyauté au gouvernement au pouvoir (rester et coopérer). Evidemment, si on sortait du pays, on perdait l’opportunité d’exercer sa propre voix, notammant dans le cas de la relations citoyen-Etat, en exerçant le droit de vote.

A cinquante ans de distance, ce mécanisme a été complètement bouleversé par l’introduction des nouveaux instruments de communication et d’information qui ont permis au citoyen national de se renseigner et de participer à des activités en tant que citoyen global et d’appliquer le mécanisme des trois réactions au niveau mondial en non pas uniquement à l’encontre d’un état.
Dans le monde de la culture aussi une réaction semblable se présente sous la plume d’auteures qui, finissant pour se sentir étroites sous une définition nationale, “sortent” de la culture nationale, ou des cultures nationales, pour se définir comme multi-locaux ou multi-niveaux, et inventent des nouvelles appelations cosmopolites (“Afropolitain” par exemple).

Des citoyennetés en évolution

Au début ce n’était question que de la double citoyenneté, nous rappelle le chercheur Nikola Mirilović dans un de ces articles [2], et elle aussi posait déjà pas mal de problèmes notamment à la théorie de Hirshman, lorsque le citoyen sorti de son pays d’origine (exit) pouvait, à travers la reconnaissance au droit à la double citoyenneté, voter (voice) soit dans le pays d’origine, en retenant avec celui-ci un lien légal, que dans le pays d’accueil, dont il avait obtenu la citoyenneté. En faisant de ce citoyen, nous rappelle Mirilović, un citoyen ayant des droits et des obligations dans des états multiples.

Après, on assiste à l’introduction de nouvelles citoyenneté, dites de “superposition” parce qu’elle s’appuient sur celle ou celles que le citoyen détient grâce à sa ou ses relations particulières avec son ou ses Etats. C’est le cas par exemple de l’introduction avec le Traité de Maastricht de la citoyenneté européenne, qui permet au ressortissant provenant de l’Union de pouvoir voter aux élections municipales et aux élections européennes dans le pays d’accueil.
Mais on peut ajouter aussi une autre citoyenneté, celle mondiale/globale, qui n’est pas liée à un ou à un groupe d’état, comme l’Union européenne, mais à un des objectif de développement durable (ODD), auxquels tous le monde et non seulement les états, mais chaque citoyen mondial, est appelé à contribuer. Ces objectifs ont été adoptés dans l’enceinte des Nations Unies et sont à réaliser d’ici à l’an 2030.

La référence à la citoyenneté mondiale est présente au sein de l’ODD 4 qui traite d’éducation, sous la cible 7, qui dit que l’objectif est celui “[…] [de] faire en sorte que tous les élèves acquièrent les connaissances et compétences nécessaires pour promouvoir le développement durable, notamment par l’éducation en faveur du développement et de modes de vie durables, des droits de l’homme, de l’égalité des sexes, de la promotion d’une culture de paix et de non-violence, de la citoyenneté mondiale et de l’appréciation de la diversité culturelle et de la contribution de la culture au développement durable”.

Et voilà que l’engagement de la société civile peut devenir de la citoyenneté globale lorsque des problèmes locaux il se tourne vers le problèmes globaux et utilise la réaction de voice, la protestation, envers d’autres gouvernements que les siens ou entreprennent des actions adressées à d’autres états, comme par exemple en recueillant des fonds pour lutter contre la pauvreté, ou pour aider l’instruction dans d’autres pays.

La culture nationale devient globale

Il y a des auteurs qui, décidément, ont des difficultés à se limiter à une connotation nationale, prenons Taiye Selasi, dans un TED talk de 2014 elle admet d’avoir toujours débuté ses présentations publiques avec un mensonge, ce mensonge étant de se définir d’une nationalité ou d’une autre [3]. Née à Londres de parents provenant de deux différents pays d’Afrique, ayant étudié aux Etats Unis, elle se définit plutôt que nationale, multi-locale ou multi-niveaux, en mettat à côté pour un instant la définition d’Afropolitain qu’elle même avait conié dans un essai de 2005 (“Bye Bye Barbar”) et qui voulait ainsi dénnomer les immigrés de deuxième génération d’Afrique, dotés d’une instruction et ayant obtenu une certaine position sociale.

Elle serait multilocale, tant que, où qu’elle soit, en Italie, en Afrique, où aux Etats Unis, elle peut exprimer ses rituels quotidiens et vivre ses relations amicales ou familiales à l’aise, comme si elle était toujours chez soi, pourvu que les restrictions locales ne le lui empêchent.

Les restrictions sont encore une fois celles exercées par les états nations à l’encontre des gens qui ne sont pas des citoyens nationaux, comme par exemple la requête des visas pour rentrer dans le pays, où les conditions politiques des régimes autoritaires, ou le sous-devéloppment économiques, choses qui font que si les parents ont fui le pays d’origine leurs enfants refusent d’y retourner.

La reconnaissance de la double citoyenneté

Mirilović dans son essai explique comme l’immigration pouvant être dans le cas des pays démocratiques un volant pour l’introduction de nouveaux droits, comme, l’élimination des visas, le developpement des liens économiques ou la participation active dans la vie politique des pays d’origine. Tout cela est possible notammant s’il s’agit de l’immigration des gens cultivés, au moins avec un année d’instruction universitaire et si on regarde les données rélatifs au stock de l’immigration, ou la pourcentage de la population nationale née à l’étranger sur la population totale. Dans ces cas l’immigration peut emmener dans le pays d’accueil à plus de probabilità d’obtenir une double citoyenneté, pourvu qu’il s’agisse d’une démocratie.

Cela est possible parce que les immigrés ayant une culture ont plus de probabilité de s’engager politiquement dans le pays d’accueil et utiliser cet instrument pour y obtenir plus de droits, où utiliser cette expérience pour entrer dans la vie politique de leur pays d’origine.

Toutefois, aujourd’hui a ces possibilités s’ajoute la possibilité d’intervenir dans la vie politique de leur pays d’origne avec les nouveaux instruments d’information, de connaissance, d’engagement et d’action fournit par la citoyenneté globale. Il existe aujourd’hui des organisations non-gouvernementales qui aident les particuliers à mobiliser leur action au niveau mondial pour une cause qui peut intéresser plusieurs pays.

Parce que, et je reviens à l’étude de Milinović, l’immigration internationale joue un rôle en structurant une institution qui forme les politiques et celle-ci est la citoyenneté. Mais, j’ajoute, aujourd’hui on a des citoyennetés multiples (nationales, internationales et globale).

Immigration et culture

L’immigration joue aussi un rôle dans la culture nationale ou dans la diversité culturelle, toujours Selasi dans son discours dit que ce sont les lieux qui forment l’expérience et l’expérience est ce que l’on est et que l’on emmène avec sois là où l’on va. Davantage, l’on ne peut plus rentrer dans des lieux d’où l’on vient, parce qu’ils n’existent plus et aussi parce l’on est changé entre temps.

On retrouve là tous les thèmes de la littérature de la diaspora, on se rend alors compte de combien la culture ait été forgée par l’immigration de par tout dans le monde et que celle que une fois était appelée de littérature métissée, métissage de langues et de cultures, maintenant jouit de l’appellation de culture diversifiée et alors on se peut demander à quand on aura des écrivains « Balkopolitan ». Peut-être existent-ils déjà.

Notes

[1Hirshman Albert “Exit, voice and loyalty”, Cambridge, Massachussets, Harvard University Press, 1970.

[2Mirilović, Nikola, “Regime type, International migration, and the polizie of dual citizenship toleration”, pp. 510-525, dans “International Political Science Review”, vol. 36(5), 2015.

[3Selasi Taiye “Don’t ask where I’m from, ask where I’m local”, TED talks, Rio de Janeiro, October 2014.