Blog • Rikardo Druškić, l’amour digital

Madness continues
©Rikardo Druškić

Il est plus facile, aujourd’hui, de rester connecter à la vie culturelle en Bosnie-Herzégovine, pour peu qu’elle soit accessible sur le net ; les réseaux sociaux permettent aux artistes d’obtenir de la visibilité au-delà des frontières. Le courant du web a ainsi semé, à ma porte, les travaux d’un artiste numérique. Je surfais tranquillement sur mon compte Facebook, à la recherche de pages piquantes qui dilateraient mes pupilles, lorsqu’un prénom à consonance hispanique sauta aux yeux, Rikardo. Ensuite, son nom, Druškić. Une belle énigme qui força le doigt – docile – à cliquer sur la souris. Artiste numérique âgé de 26 ans, il vit à Sarajevo, un pur produit de la capitale. Verbe rapide, slang à gogo, Rikardo Druškić incarne cette jeunesse qui rayonne extra muros, le vent en poupe sur catamaran.

Sa toile – Madness continues – est arrivée en finale d’un concours majeur en Asie – Art Revolution Taipei. En juillet 2014, le collectif see.mee a choisi Madness continues et Depth pour être présentés sur Times Square à New York, une grosse dose de visibilité non négligeable pour son C.V. Beginning (Poĉetak) a remporté le premier prix du concours Abstract 2 à New York en 2015. Vingt de ses travaux ont également été exposés au LACDA – Los Angeles Center for Digital Arts.

Depth
©Rikardo Druškić

Grâce à l’art, ce type vole à son propre secours, Madness continues décline le combat que mène un jeune homme, perdu, à la recherche de sens. Son message est universel ; la jeunesse est ballottée jusqu’aux antipodes, peu importe où, elle aspire à se réaliser, à s’émanciper. En Bosnie-Herzégovine, avec environ 60% de chômage chez les jeunes, les perspectives sont morcelées ; il ne reste que les bouts du miroir brisé auxquels il faut s’accrocher. A l’heure où le blocage chronique du système institutionnel en Bosnie- Herzégovine est visible comme la lumière qui éclaire un soir de pleine lune, nous dressons le portrait d’un jeune homme frais à l’haleine de sels de mer. Interview digital.

D.P : Quand as-tu commencé à faire de l’art digital ?

R.D : J’ai commencé il y a sept ans, en terminal.

D.P : Que signifie « l’art digital » ?

R.D : L’art digital est le processus par lequel les émotions se manifestent à l’aide de moyens digitaux, dans mon cas, le logiciel Photoshop.

Početak
©Rikardo Druškić

D.P : Peux-tu expliquer ta technique de travail ?

R.D : Je combine l’art traditionnel et moderne. Le travail apparaît parce que je le dessine, c’est le moment où les formes et les émotions émergent sur du papier. Ensuite, je scanne le dessin afin de l’intégrer dans un programme où j’ajoute et potasse les couleurs. Cette ultime étape va fixer le travail au format digital.

D.P : Où et quand as-tu exposé pour la première fois ?

R.D : Ma première exposition collective a eu lieu il y a trois ans, au Collegium artisticum Sarajevo. En solo, j’ai exposé pour la première fois à la galerie Boris Smoje, il y a deux ans.

D.P : Qu’est-ce qui t’inspire ?

R.D : L’amour, les gens qui m’entourent, mes rêves et les aspirations qui me portent.

D.P : Qu’est-ce que tu trouves important dans la vie ?

R.D : De loin, l’amour est ce qui m’importe le plus. C’est l’émotion qui me lance, celle à
laquelle j’aspire, j’aime la donner et la recevoir. Je pense que si le sens de la vie existe, il brille dans le partage interactif de l’amour.

The three musketeers
©Rikardo Druškić

D.P : Quelle musique écoutes-tu en ce moment ?

R.D. : J’écoute énormément de la musique électronique, un large spectre de genres et de sous-genres. J’apprécie notamment les artistes suivants : Max Cooper, Petar Dundov,
Recondite, Extrawelt, Nils Frahm, Mathew Jonson, etc.

D.P : Peux-tu décrire, en quelques mots, Sarajevo ?

R.D : Une ville pleine d’émotions ; elles sont cependant fort mal distribuées.

D.P : Qu’est-ce que t’apporte l’art ?

R.D. : L’art m’a donné la chance d’avoir une vie normale, d’être accepté et apprécié. Cela m’a apporté l’espoir d’un lendemain meilleur et la possibilité de développer mes capacités intellectuelles ; tout cela a été utile pour moi, mais aussi pour mon entourage.

D.P : Où et quand se tiendra ta prochaine exposition ?

R.D : Je ne le sais jamais. À court terme, exposer n’est pas un but.

D.P : Quels sont tes plans ?

R.D. : Le plan, c’est de constamment progresser. Dès le moment où je progresse, la route est tracée pour réaliser d’autres plans.

(Interview traduite du bosnien par Denis Pepic)

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