Médias en Moldavie : la censure au nom de la « menace russe »

| |

La réforme du code de la diffusion télévisuelle risque de mettre en danger le pluralisme des médias en Moldavie : visant à « réduire les influences étrangères », cette réforme sert en fait les intérêts des oligarques des médias comme Vlad Plahotniuc.

Cet article est accessible gratuitement pour une durée limitée. Pour accéder aux autres articles du Courrier des Balkans, abonnez-vous !

S'abonner

Par Maria Bona

© Wikipedia

Le 7 juillet, le parlement moldave a adopté des amendements sur la régulation du secteur audiovisuel, introduisant de sévères restrictions dans les programmes en langue étrangère et ceux venus de l’étranger.

Justifiée comme une tentative de réduire l’impact de la propagande russe dans le pays, cette mesure risque d’avoir de graves répercussions sur la liberté de l’information et le pluralisme des médias en Moldavie. « Ces mesures constituent une forme indirecte de censure et limitent le droit des citoyens à avoir accès à une information pluraliste », ont dénoncé des organisations internationales, dont l’OSCE et le Conseil de l’Europe.

Selon Petru Macovei, directeur de l’Association de la presse indépendante (API), les amendements proposés révèlent l’influence exercée sur le parlement par les oligarques des médias, dont le but est la préservation de leurs intérêts. L’amendement qui fait l’objet des discussions, proposé par le Parti démocratique (PDM), a été « élaboré avec Media House et General Media Group, qui appartiennent à Vlad Plahotniuc », précise Petru Macovei.

« Le cardinal de l’ombre »

Le controversé oligarque Vlad Plahotniuc, propriétaire de General Media Group, contrôle plusieurs chaînes de TV en Moldavie (Public TV, Prime TV, Canal 2 et Canal 3, ainsi que CTC Moldova et Super TV depuis février dernier), et a une influence déterminante dans hautes les sphères politiques du pays. Membre à deux reprises du parlement national entre 2010 et 2015, il est actuellement vice-président du PDM, et défend la révision de la régulation du secteur audiovisuel.

Pour le PDM et Vlad Plahotniuc, il importe que le projet de loi 218 soit adopté, car la compétition dans le secteur de la diffusion en Moldavie sera moins équitable. Vlad Plahotniuc se retrouvera en position privilégiée, mais les petits diffuseurs, incapables de supporter les nouvelles exigences, seront écartés du marché, met en garde Petru Macovei.

La réforme du Code de la diffusion en Moldavie est débattue depuis 2011, mais elle a été différée à plusieurs reprises. Le processus a démarré en mars 2015. Parmi les recommandations formulées par les corps internationaux contrôlant la liberté des médias, un aspect important était l’adoption de mesures de protection du pluralisme et l’introduction de limites sur la concentration de la propriété des médias dans le pays. Une première étape positive dans cette direction a été franchie en 2015 quand, après consultation avec le Centre pour le journalisme indépendant, le parlement a introduit une condition : révéler les identités des propriétaires de médias de masse. Mais les compagnies offshore qui contrôlent les actions ont échappé au contrôle.

Les restrictions à l’accès au capital étranger dans le secteur de l’information étaient déjà appliquées aux médias imprimés, a rappelé la Freedom House. L’extension de ces régulations à la télévision devrait encore plus éroder le droit au pluralisme des médias en Moldavie.


Cet article est produit en partenariat avec l’Osservatorio Balcani e Caucaso pour le Centre européen pour la liberté de la presse et des médias (ECPMF), cofondé par la Commission européenne. Le contenu de cette publication est l’unique responsabilité du Courrier des Balkans et ne peut en aucun cas être considéré comme reflétant le point de vue de l’Union européenne.