Blog • La légende de Jelica

|

Voyka nous invite à retrouver l’imaginaire et le merveilleux des contes d’antan. Des immémoriaux venus d’un passé lointain et qui résonnent encore aujourd’hui dans un présent si encombré d’images et d’objets...

Par Voyka Milovanovic

Le Danube sépare la région de Branicevo de la Roumanie, au nord-est de la Serbie. Trois rivières la traversent avant de se jeter dans le Danube. La plaine appelée Stig et les monts Beljanica, Kucaj et Homolje rendent cette région fertile et riche en produits agricoles. Elle se trouve au carrefour des civilisations orientales (ottomanes) et de nombreux monastères s’y trouvent. Là, la religion orthodoxe serbe a trouvé refuge pendant les 7 siècles d’occupation turque. D’ailleurs, Branicevo vient du mot « défense ».

On raconte que Saint Georges a attrapé puis tué le dragon qui terrorisait les habitants dans cette région qui a reçu le nom de « stig », attraper.
Peu avant la fameuse bataille du champ des merles au Kosovo en 1389, la chanson de geste « Dieu ne doit rien à personne » prend racine.

Les comtes Pavle et Radul ont une sœur, Jelica qu’ils adorent et couvrent de cadeaux au point de provoquer la jalousie de l’épouse de Pavle. Cette dernière tue le cheval et le faucon de son mari et accuse Jelica qui nie. Ses frères la croient. Elle a leur confiance. Et l’épouse de Pavle, folle de jalousie et de haine, tue son propre enfant et accuse à nouveau Jelica. La douleur et la tristesse ont envahi le cœur de Pavel et de Radul. La confiance a disparu. Jelica ne peut vivre sans cette confiance et demande qu’on l’écartèle. Ce qui est fait. Ils attachent les membres de cette pauvre Jelica à la queue de 4 chevaux …
Et le corps de Jelica se disloque. A l’endroit où ses yeux seraient tombés le monastère Sestroljin (vient du mot sœur) est construit. On y guérirait les maladies des yeux. Au monastère Rukumija (du mot main), les mains seraient tombées, à celui de Zaova (de belle-sœur), le corps et à Bradatcha le menton. Chaque monastère porte le souvenir de Jelica.

Et qu’est-il arrivé à l’épouse de Pavle ? Le peuple lui a donné le nom de « Chienne de Pavle ». Malade, elle a demandé pardon, en vain, son mari l’a tuée et « chienne de Pavle » est, en serbe, la plus grande insulte qu’on puisse dire à une femme.

Alors que reste-il aujourd’hui des contes d’antan dans cette modernité galopante qui se déverse sur les écrans mais aussi au fin fond des campagnes des Balkans. Vous pouvez en retrouver tout le merveilleux et les traces encore si présentes dans l’imaginaire dans l’ouvrage « Contes populaires serbes » de Vouk Karadjitch paru initialement en France en 1934, et intégralement réédité aux Editions L’Age d’Homme, avec une parution en livre de poche en 2003.

Plus récemment un ouvrage en français de Natacha Pejin superbement illustrée par Mila Gajin reprend plusieurs de ces contes historiques dont le très célèbre « Le pommier d’or et les neuf paonnes ». Le livre « Les contes populaires serbes » est paru en octobre 2014 aux Editions « Un infini Cercle Bleu » une association parisienne qui diffuse la culture serbe dans le monde francophone. Bonne lecture !