Blog • Les Balkans après le Brexit : vers de nouveaux espaces de coopération ?

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Quels effets aura le Brexit sur le processus d’intégration européenne ? Est-il possible que des nouveaux moyens de coopération puissent relancer le processus d’intégration ? Et quelle place pourraient avoir les pays des Balkans dans ces nouveaux processus ? Le Brexit pourrait-il être une chance pour chercher des nouveaux « espaces » de coopération ?

Pendant des années on a cru que le processus d’intégration européen se serait développé au fur et en mesure que de nouveaux Etats européens en devenaient membres. C’est surtout l’élargissement de 2004, dix pays d’un seul coup, celui qui devait reconstruire l’Europe afin de la réconcilier en unifiant les deux parties de l’Europe de l’Ouest et de l’Est qui avait donné cet impression. D’ici aussi l’idée que les Balkans occidentaux (et non pas orientaux dans leur définition) devaient eux aussi faire partie de ce processus de réunion, afin de récupérer aussi cette partie d’Europe, l’Europe du Sud-est, qui manquait encore à l’appel.

Le Brexit a complètement renversé cette conviction, pour la première fois, l’Europe, au lieu de rajouter de pays en a presque perdu un, on craint que le processus puisse continuer et l’on peut justement se demander si l’adhésion de nouveaux Etats, dans ces conditions, ait encore du sens.

En voyant les choses d’une autre perspective, celle des pays qui en sont dehors, on voit mal comment un autre pays puisse encore désirer de joindre une Union qui se défait, dont la "fatigue d’élargissement" des derniers années, que les pays des Balkans ont pu bien expérimenter, s’est transformée en fatigue, tout court, d’emmener à bien tout processus d’intégration, non seulement envers l’extérieur, mais aussi avec les pays déjà membres du projet. Dans le cas du Royaume Uni on peut aussi ajouter : « historiquement » membres du processus.

Où en est-on aujourd’hui avec le processus de construction de l’Union européenne ?

La sortie d’un des pays membres de l’Union va poser de lourdes questions sur le processus de construction de l’Union européenne. Peut-être avec l’Union s’est-on poussé trop loin et l’on s’est éloigné du véritable dessin des pères fondeurs de l’Europe ? D’ailleurs, le Royaume Uni a toujours montré depuis son adhésion une conduite particulière au sein du projet de construction européenne qui en a fait un pays membres à part ; voir la non-participation aux Accords de Schengen, le refus de la monnaie unique. Le "opting-out" a toujours été une issue qui a permis au Royaume Uni de faire partie de l’Union en choisissant quoi éviter.

Mais jusqu’à là on avait de toute façon progressé en trouvant des solutions à l’amiable. Le Brexit a fini pour montrer sous les yeux de tout le monde ce que peut-être on ne voulait pas voir, or, que les dessin des pères fondeurs de progresser avec des formes de "coopération concrètes", s’est arrêté face aux défis d’envergure globale, comme la vague d’immigration qui est en train de traverser l’Europe et que, à cause des conditions économiques ambiantes, aucun pays a vraiment l’intention d’assumer concrètement. Plutôt de coopération, on espère que la vague va toucher le pays d’à côté et épargner le sien.

Certes, les "coopérations concrètes" étaient plus facile à trouver lorsque le défi était uniquement européen, à dimension européenne, voir au cœur de l’Europe, comme mettre ensemble le charbon et l’acier afin d’éviter que France et Allemagne se fassent encore la guerre, ou créer une monnaie unique à complément d’un marché intérieur déjà fonctionnant.

Ces "coopération concrètes" sont devenue avec les temps des "coopérations renforcées", lorsque d’objectif concrets comme le marché unique ou la monnaie unique ont laissé palace à d’autres issues plus épineuses, comme celle de la Politique extérieure et de sécurité commune. Les décisions étant plus difficiles à prendre, on les prenait à petit groupes, mais toujours sous un cadre formellement unitaire et de coopération. Enfin, une autre forme d’« opting-out » pour les moins convaincus.

Hélas, en renonçant au jeux coopératif, comme l’Angleterre a fait, tout le monde y perd, non seulement les citoyens anglais, mais tout citoyen européen. La libre circulation, une des quatre libertés historiques du marché unique, est la première des victimes de cette renonciation. L’Angleterre espère par le Brexit d’arrêter la vague des immigrés, mais elle pose des limites aussi à la libre circulation des citoyens européens, soit des étudiants de ses prestigieuses universités qui venait de tout Europe, ainsi que des jeunes qui depuis quelques années avaient trouvé à Londres un endroit propice à leur épanouissement professionnel. Par le Brexit on renonce non seulement aux immigrés, mais aux jeunes cerveaux d’autres pays européens.

On peut toujours chercher des formes d’intégration alternatives, voir les théories sur la "géométrie variables", ou sur l’intégration par "centres concentriques" qui étaient à la mode dans les débats des années quatre-vingt-dix. On peut aussi faire recours à des formes de coopération souples qui s’élargissent et se rétrécissent selon les nécessités, je pense à l’Espace économique européen, où à la ALECE (Association de Libre Echange des pays de l’Europe Centrale). Pour ce genre de choses les diplomates européens ont toujours eu assez d’inventive et les pays des Balkans ont offert un utile terrain d’expérimentation dans le passé.

Mais la vague d’immigration est toujours là et bâtir des murs, comme il a été fait aussi dans les Balkans, n’est pas suffisant. Cet été, en sortant de la Croatie passant par la Slovénie, le matin tôt, peu après l’ouverture de la frontière surveillée entre Croatie et Slovénie, j’ai vu entassé à côté de la route des barbelés flambant neuf. C’était depuis 1991 que je ne voyais pas des barbelés sur la frontière entre ces deux pays.
L’enjeu n’est tant de renoncer ou d’ajouter un pays au projet européen, mais de changer la nature de l’intégration du continent

La vague d’immigration est en train de changer la donne au cœur de l’Europe, nos sociétés ne sont plus les mêmes. Le futur citoyen européen ne sera pas européen au sens stricte du terme, il appartiendra au monde entier, il sera issue d’un continent de souche différent et il apportera une culture, une tradition et des idéaux différents. D’ici aussi la nécessité de trouver au sein de l’Europe des moyens nouveaux de gouvernance. Derrière la fatigue d’élargissement et le Brexit il y a la même chose la perte d’identité et de l’idéal européen, face aux difficultés actuelles : crise économique, vague d’immigration, attentats terroriste, on réagit tous à la même façon : on pense avant tout à soi-même, ça devient difficile d’être généreux avec autrui, peu importe qu’il soit jeunes gens, ou plutôt immigrés économiques ou refugiés politiques.

Changer le modèle de gouvernance

Le Brexit est le résultat d’une incompréhension de la part de l’opinion publique anglaise de l’utilité de faire partie de l’Union européenne face à des défis majeur comme la vague de l’immigration. On en déduit qu’il devient nécessaire faire en sorte que les processus de prise de décision à l’intérieur de l’Union européenne deviennent plus compréhensible et démocratiquement responsable. Il ne s’agit plus de la question du déficit démocratique dans les institutions européennes, mais de leur responsabilité politique face à ces électeurs (accountability en langue anglaise). La théorie de la « gouvernance expérimentale » prévoit la possibilité de changer la façon de prendre des décisions au niveau européen à travers l’introduction d’une nouvelle « architecture expérimentale » qui puisse prendre en considération aussi des expressions et de méthodes de discussion et de travail concernant la société civile et de quelque sorte l’engageant dans le processus.

A propos de ces théories nouvelles et expérimentales jusqu’en 2012, j’ai personnellement participé à une Conférence à Warwick en novembre 2012 sous le titre « Networked Learning in Transnational Governance », organisée par le projet de recherche financé par l’Union européenne GR:EEN (Global Re-Ordering : Evolution through European Networks), où j’ai présenté le papier intitulé « European Union enlargement to Western Balkans. The ‘European model’ in the light of the ‘network analysis’. Do we really want to reconstruct Yugoslavia ?”, sont désormais acquises et dans une récente publication d’un manuel de droit de l’Union européenne elles y sont présentes à plein titre.

Et si le Royaume-Uni s’était trompé au sujet de l’Europe ?

Dans mon papier, dont le titre était volontairement provocateur, j’avais repris une théorie qui m’est chère et que j’ai souvent cité aussi dans les pages de ce blog, la théorie de l’ « Espace yougoslave » du Professeur Ivan Ðurić, y ajoutant une analyse basé sur les instruments de l’analyse du réseaux qui me permettait d’ajouter, des donnés des échanges commerciaux à la main, une ultérieure confirmation des théories de Ðurić datant de la fin des années quatre-vingt-dix. Cela pour dire que il existent bien des formes de « coopération dans les faits » qui pourraient être une autre déclinaison des coopérations avant concrètes, après renforcées que l’on a vu avant et qui travaillent sur le terrain et qui permettent de bien fonctionner parce que soutenues par des conduites réelles des opérateurs économiques et sociaux.

Enfin, j’aimerais bien vous poser la même question que l’auteur du manuel su cité dans un essaie ajouté après publication du manuel, à complétement du matériel y traité, avec une analyse sur le Brexit : et si le Royaume-Uni s’était-il trompé, en bonne fois ? D’ailleurs, l’analyse des éventements juridique nécessite du recul et du temps pour bien l’exercer et l’apprécier.