Bosnie-Herzégovine : David Dragičević disparaissait il y a un an, dans la nuit du 17 au 18 mars 2018

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David Dragičević a disparu en mars 2018. Alors que son meurtre demeure inexpliqué, le corps du jeune homme a été réenseveli en Autriche. A Banja Luka, les manifestations ont été violemment réprimées, mais les citoyens viennent pourtant chaque soir allumer des bougies devant l’église du Christ-Sauveur. Notre fil d’info sur un mouvement qui n’en finit pas de bouleverser la RS et la Bosnie-Herzégovine.

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Par la rédaction

David Dragičević a disparu il y a un an, la nuit du 17 au 28 mars 2018

18 mars 2019 - 12h : C’est il y a un an, dans la nuit du 17 au 18 mars 2018, que David a disparu. Son corps mutilé a été retrouvé le 24 mars. Ce drame, dont les circonstances n’ont toujours pas été officiellement établies, a provoqué un mouvement de contestation d’une ampleur inédite, qui a secoué Banja Luka, la capitale de l’entité serbe, la Republika Srpska et la Bosnie-Herzégovine tout entière.

David Dragičević a été enseveli en Autriche

© Buka.ba / Goran Božić

15 mars 2019 - 17h : David Dragičević, dont les restes avaient été exhumés mardi à Banja Luka, a été à nouveau enterré dans le cimetière de Wiener Neustadt, près de Vienne. Des centaines de militant.e.s du groupe « Justice pour David ! » ont accompagné le jeune homme dans sa dernière demeure.

Les citoyens tentent à nouveau de manifester à Banja Luka

10 février 2019 - 8h30 : Alors que tous les rassemblements sont interdits depuis le 30 décembre, des centaines de citoyens ont tenté à nouveau de manifester samedi soir dans le centre de Banja Luka. Après s’être réunis, comme chaque soir, sur le parvis de l’église du Christ-Sauveur, ils ont marché jusqu’à l’hôtel Palas, où ils ont été bloqués par la police. Des manifestants ont continué à se « promener » dans le centre de la ville. La police a contrôlé l’identité de deux journalistes, tandis que six manifestants ont été interpelés.

Davor Dragičević s’exprime sur N1

6 février 2019 - 21h30 : Davor Dragičević, le père de David, qui a « disparu » de Banja Luka le 30 décembre dernier, a donné pour la première fois une interview à la télévision N1, assurant se trouvant sur un « territoire libre », et assurant que les dirigeants de la Republika Srpska avaient planifié sa liquidation, raison qui l’avait poussé à entrer dans la clandestinité.

21 janvier - 23h30 : Ce 21 janvier, des dizaines de personnes se sont rassemblées pour allumer des bougies devant l’église du Christ-Sauveur, dans le centre de Banja Luka, en mémoire de David Dragičević. Il s’agissait du 302ème rassemblement consécutif demandant justice et vérité pour le jeune homme assassiné en mars 2018. Les participants ont décidé de se diriger vers la place de Krajina, où tous les rassemblements sont interdits depuis le 30 décembre. La police a arrêté deux participants.

Lundi soir à Banja Luka
© BN TV

7 janvier - 21h : Davor Dragičević, qui a disparu depuis le 30 décembre, a publié un message sur Facebook lundi en fin d’après-midi, annonçant qu’il allait bien et « qu’ils n’avaient pas réussi à le liquider », mais sans donner d’indices sur l’endroit où il pourrait se trouver.

6 janvier - 9h : Malgré l’absence de Davor Dragičević, en fuite depuis le 30 décembre, et de Suzana Radanović, les parents de David, une centaine de citoyens se sont rassemblés samedi soir devant l’église du Christ-Sauveur, dans le centre de Banja Luka pour déposer des bougies à la mémoire du jeune homme assassiné. Tous les rassemblements restent interdits par la police sur la Place de Krajina.

2 janvier - 18h15 : La police dispersé rapidement, mais sans violence, les quelques centaines de personnes qui s’étaient rassemblées le 2 janvier au soir autour de Suzana Radanović, la mère de David, pour allumer des bougies devant la cathédrale du Christ-Sauveur, dans le centre de Banja Luka.

10h45 : La police a émis un mandat d’arrêt contre Davor Dragičević, toujours introuvable, et trois autres membres du groupe Justice pour David. On leur reproche d’avoir mené sur un parcours non-autorisé les manifestations des 27 et 30 décembre. Selon certains médias de RS, Davor Dragičević pourrait être en train de négocier avec la police les conditions de sa reddition.

Lundi 31 décembre, quelques centaines de personnes sont réunies autour de Suzana Radanović, la mère de David, devant la cathédrale du Christ-Sauveur, tout accès à la place de Krajina étant interdit par la police.

31 décembre - 18h : Davor Dragičević est toujours introuvable. La police a annoncé que toutes les manifestations étaient interdites ce 31 décembre au soir à Banja Luka.

11h : Lundi matin, Davor Dragičević, l’organisateur du mouvement de protestation, manque toujours à l’appel. Selon sa famille, le père de David a été vu pour la dernière fois dimanche soir sur la Place de Krajina. Les autorités nient l’avoir en détention.

Davor Dragičević craint peut-être d’être à nouveau arrêté comme le 25 décembre dernier. Dimanche soir, dans un communiqué, la police a déclaré que « l’organisateur de l’évènement n’a pas respecté les obligations légales et a commencé une marche avec d’autres participants où plusieurs délits ont été commis par les participants du rassemblement public ». « Ceux qui ont organisé la manifestation sont responsables parce qu’ils ne l’ont pas organisée de manière adéquate », a déclaré Milorad Dodik, le membre serbe de la présidence tripartite de Bosnie-Herzégovine et homme fort de la RS. « Tous ceux qui ont été violents doivent être arrêtés et être tenus responsables de leurs actes. Cela a été trop loin. »

Dimanche soir à Banja Luka : « contre la terreur du gouvernement »
© twitter

30 décembre – 23h30 : La police spéciale a finalement évacué la Place de Krajina, arrêtant plusieurs manifestants et détruisant le mémorial à nouveau érigé en l’honneur de David Dragičević. Son père, Davor, figurerait parmi les personnes interpelées. Les journalistes sont tenus à l’écart.

Le groupe Justice pour David appelle à de nouveaux rassemblements lundi soir, assurant qu’il n’y aurait pas de fête du 1er de l’An à Banja Luka. Il veut notamment empêcher la tenue du concert prévu en plein air. Ce dimanche soir, les manifestants ont réussi à faire arrêter le concert de Haris Džinović.

Commentant les manifestations à Banja Luka et Belgrade, Milorad Dodik, le membre serbe de la présidence tripartite de Bosnie-Herzégovine, a déclaré dimanche 30 janvier qu’elles étaient coordonnées et que le Royaume-Uni était derrière elles. Il a ajouté que le mouvement avait pour but de faire tomber les gouvernements de Republika Srpska et de Serbie, pour « faire barrage à la soit-disant influence russe ».

À ce jour, les manifestations ont été tenues pendant 280 jours de suite.

19h30 : Les manifestants ont défilé dans les rues de Banja Luka, réclamant notamment la démission du ministre de l’Intérieur de la Republika Srspka, Dragan Lukač. Passant devant le siège de la télévision publique RTRS, ils sont scandé « assassins ! assassins ! », avant de revenir sur la Place de Krajina.

Davor Dragičević a annoncé qu’il y resterait jusqu’à ce que ses revendications soient satisfaites. Il a donné aux autorités jusqu’au 9 janvier 2019 pour y répondre. Cet ultimatum coïncide avec la controversée fête nationale de la RS.

À Sarajevo, les manifestants ont marché jusqu’à Baščaršija, réclamant « justice pour David, justice pour Dženan ! ».

18h45 : Des milliers de personnes sont rassemblées sur la place de Krajina, dans le centre de Banja Luka. La manifestation avait été déclarée auprès des autorités et, alors que la police bloquait depuis le 25 décembre les accès à la place, aucune présence policière n’est visible ce soir. Le père et la mère de David Dragičević ont pris la parole.

Des centaines de personnes se sont également rassemblées ce soir à Sarajevo, devant le Musée national de Bosnie-Herzégovine, affirmant leur solidarité avec les manifestants de Banja Luka, réclamant justice pour David, mais aussi pour Dženan Memić, ce jeune homme de Sarajevo également tué dans des circonstances obscures. Son père, Muriz Memić, a pris la tête de la colonne.

28 décembre – 21h15 : Ce vendredi soir, plusieurs centaines de personnes ont à nouveau défilé dans les rues de Banja Luka, à l’appel du groupe « Justice pour David ! ». La police bloquait à nouveau l’accès à la place de Krajina. « Ils pourront encore nous bloquer comme ça demain, mais dimanche, la place est à nous », a lancé Davor Dragičević, le père de David. Un grand rassemblement est prévu dimanche.

11h : Plusieurs centaines de personnes se sont à nouveau rassemblées jeudi 27 décembre à Banja Luka pour demander « justice pour David ». Alors que la police bloquait l’accès à la Place de Krajina, Davor Dragičević, le père de David, a emmené la foule sur les sentiers où, d’après lui, son fils a été assassiné dans la nuit du 18 mars 2018. Dans une colonne silencieuse, ils se sont rendus jusqu’à la maison que David aurait cambriolée, selon le rapport de police, puis sur le pont duquel David serait « tombé » dans le fleuve. La foule s’est ensuite dirigé vers le palais présidentiel de la Republika Srpska, gardé par un important dispositif policier.

« Tous ceux qui ont participé au crime seront sanctionnés », a lancé Davor Dragičević, appelant à une nouvelle manifestation vendredi 28 décembre à 18h sur la Place de Krajina. Il a aussi annoncé un grand rassemblement dimanche 30 décembre.

Jeudi 26, des manifestations de soutien ont également eu lieu à Zagreb et à Novi Sad. Mercredi 25 décembre, des manifestations avaient été organisées à Belgrade, Sarajevo et Tuzla.

Novi Sad, jeudi soir
© twitter / Maja Ledjenac

Mercredi 26 décembre – 21h : Le ministre de la Sécurité de Bosnie-Herzégovine, Dragan Mektić, issu du Parti démocratique serbe (SDS), en opposition à Milorad Dodik, a déclaré mercredi qu’il « n’excluait pas la possibilité » que des fonctionnaires de la police de Serbie soient venus prêter main-forte à leur collègues de Republika Srpska pour réprimer les manifestations de mardi à Banja Luka. Le ministre de l’Intérieur de Serbie, Nebojša Stefanović, a aussitôt rétorqué que ces assertions étaient « plus que scandaleuses ».

19h30 : Des milliers de personnes ont défilé calmement dans le centre de Banja Luka, les accès à la Place de Krajina étant bloqués par un imposant dispositif policier. Peu après 19h, Davor Dragičević, le père de David, assassiné dans la nuit du 17 au 18 mars, a appelé à la dispersion.

À Sarajevo, plusieurs centaines de personnes se sont rassemblées, comme hier, devant le Musée national. Un rassemblement a également réuni une centaine de personnes à Tuzla.


© Klix

Après 24h de garde à vue, Davor Dragičević a été libéré par la police de Republika Srpska. Le père de David, dont la mort au printemps dernier a secoué toute l’entité serbe de Bosnie, a promis de poursuivre son combat pour connaître la vérité sur ce qu’il considère comme un meurtre politique. « Je suis Davor Dragičević, le père fier dont le fils a été assassiné. Je connais les commanditaires et les meurtriers de mon enfant », a-t-il lancé dès sa libération, le poing levé. Il a promis de poursuivre sa mobilisation pour obtenir justice pour son fils et appelé la population à se rassembler place de la Krajina à Banja Luka, le lieu des manifestations quotidiennes qui se tiennent depuis plus de neuf mois.

Le ministre de l’Intérieur de la Republika Srpska a déclaré lors d’une conférence de presse, mercredi après-midi, que les autorités de Banja Luka ne toléreraient plus ces rassemblements « illégaux », qui « dérangent la vie quotidienne des autres citoyens ».

Dragan Lukač a accusé l’opposition d’avoir « manipulé l’opinion publique » et assuré que les policiers n’avaient pas fait usage d’une « force excessive » pour contenir, mardi, la colère des manifestants après l’arrestation de Davor Dragičević. Les images, abondamment relayées sur les réseaux sociaux, montrent pourtant le contraire.

Des rassemblements de soutien sont prévus ce mercredi soir à Banja Luka, mais aussi dans d’autres villes de Bosnie-Herzégovine, notamment à Sarajevo et à Tuzla. Dans la capitale de l’entité serbe, le dispositif de sécurité a été renforcé, particulièrement autour de la place de la Krajina. Le rassemblement est pourtant prévu devant la cathédrale du Christ sauveur, comme mardi soir, là où les manifestants se sont réfugiés après avoir été délogés manu militari de la place de la Krajina où ils se retrouvaient chaque soir depuis le mois de mars.

A Belgrade, des centaines de personnes se sont rassemblées sur le plateau de la Faculté de Philosophie, à l’appel du mouvement Ne Davimo Beograd.